1.D – Brèves de Décembre 2019 – février 2020

* 29 févrierRetour à la barbarie initiale. L’administration américaine signe, à Doha, avec les Taliban afghans, un accord de retrait de ses troupes. Spectaculaire aveu d’échec pour Washington et pour l’OTAN, il acte l’échec d’une guerre de 18 ans et ouvre la voie à un retrait progressif, sans trop de casse. En échange de cette victoire, les Talibans concèdent de vagues garanties sécuritaires et acceptent l’ouverture de discussions de paix inter-afghanes. Les voilà dominant à nouveau la scène politique. Le régime faible du président Ghani est le grand vaincu , alors que ses troupes et sa police, sur le défensive, se délitent. L’accord de paix légitimera les Talibans aux yeux de la population. Pour définir l’avenir du pays, ils fixent comme condition de ne pas négocier avec Kaboul mais avec des « représentants » de la société.  La guerre civile va repartir de plus belle et à leur avantage. Les femmes, jeunes, artistes, intellectuels et la société civile afghane ont motif à s’inquiéter. L’électeur « trumpiste » du Middle West est, lui, satisfait.

* 28 février – Inhumanité. Idleb, le plus grand drame humanitaire du Siècle (quitte à se répéter) et voilà que les folies guerrières assiègent un million de démunis. Une vingtaine de soldats turcs est tuée dans les frappes aériennes qui dévastent cette région. Ces pertes s’inscrivent dans une spirale d’affrontement entre Ankara (qui occupe un territoire syrien pour le « nettoyer » des Kurdes) et le régime de Damas, appuyé par Moscou.  De déséquilibré, le néo-sultan Erdogan en devient fou-furieux. Pas à cause des nombreuses victimes civiles, mais à cause de sa fierté blessée. Une riposte militaire est décidée, au moins contre Damas sinon contre son protecteur et allié russe (qui tente, en vain, de calmer le jeu). Un comble : Ankara fait appel à la solidarité atlantique, après avoir trahi l’OTAN par ses comportements offensifs, ses achats d’armes et ses tractations cyniques… avec Moscou ! Pour faire bonne mesure, une fois de plus, la menace est lancée d’ouvrir « les vannes » aux réfugiés entassés sur son territoire, pour submerger l’Europe. On devrait suspendre la Turquie de l’Alliance atlantique en attendant qu’elle s’achète une conduite. Malheureusement, D. Trump pense le contraire et l’encourage…

* 27 février – Mort aux faibles ! Dans une tribune du Monde, les ministres des Ae de 14 pays européens (dont la France et l’Allemagne) appellent Moscou et Ankara à suspendre leurs offensives respectives dans la province syrienne d’Idleb et à contribuer plutôt à une solution politique ». Ils dénoncent les violations massives du droit international humanitaire sous couvert de ‘’lutte antiterroriste’’ et exigent le respect de l’accord de cessez-le feu de Sotchi. La progression des forces syriennes dans la province d’Idleb, frappée de la pire catastrophe humanitaire du Siècle, a, depuis lors, précipité l’affrontement avec la Turquie, qui appuie les groupes rebelles. E. Macron et A. Merkel proposent un sommet sur la Syrie avec leurs homologues turc et russe. Mais Sergeï Lavrov rejette cet appel, qui n’aboutirait qu’à une « capitulation face aux terroristes ». L’Europe dispose d’une voix mais d’aucun levier pour se faire entendre. Elle se contente donc de faire de la figuration.

* 26 févrierLes Américains débarquent !« Démontrer la capacité de l’armée américaine à déployer rapidement une force importante pour soutenir l’Otan et à répondre à n’importe quelle crise ». 20 000 militaires américains et tout leur matériel sont attendus pour participer à l’exercice militaire Defender Europe 20, qui se déroulera, en mai et en juin, dans 10 pays, dont l’Allemagne. Leur nombre va croître jusqu’en mai prochain, pour intégrer l’effectif de 37 000 soldats de 18 pays mobilisé pour l’occasion. Ce sera le plus gros déploiement militaire des États-Unis depuis 25 ans sur le sol européen.  Plusieurs ports et bases aériennes du continent vont être « envahis », notamment le port de La Rochelle.  Qu’en dit le coronavirus ?

* 25 février Macron  »dézingue »-t-il Paul Biya, comme le titre un quotidien de Yaoundé ? Interpellé  par un Camerounais de Paris au Salon de l’agriculture, le président français a annoncé qu’il allait mettre la  »pression maximum » sur son homologue camerounais, coupable de répression sanglante contre les autonomistes de l’Ouest anglophone de ce pays. Une manifestation de protestation contre  »l’ingérence française » s’est aussitôt formée devant l’ambassade de France à Yaoundé. Biya est l’un des pires tortionnaires que compte l’Afrique francophone. La complaisance  »France-Afrique » à son égard rencontre la réprobation. Sa critique suscite la colère contre  »l’arrogance coloniale ». La société civile devrait s’exprimer, ici et là-bas.

– Officiellement, aucun cas de coronavirus en Afrique noire. Vous y croyez, vous ?

* 24 février – Fin de caranaval, à Venise (et ailleurs). L’épidémie de coronavirus se répand comme traînée de poudre. Trois morts, 100 cas de contamination en Italie, où onze villes (52 000 habitant) sont mises en quarantaine, dont dix en Lombardie. Entreprises fermées.

Huit morts et 43 cas déclarés en Iran, où ont été fermés les établissements éducatifs de 14 provinces, y compris Téhéran, ainsi que tous les lieux de culture et de loisir à travers le pays.

– Alerte rouge en Corée du Sud après une subite hausse des contaminations (1240 cas), au sein d’une église charismatique. 93 000 fidèles sont mis en isolement (châtiment céleste ?).

Le trafic de masques, des gants et de médicaments va enrichir quelques indélicats, aux dépens des établissements de soin. Partout, on s’épuise à calmer la population et à modérer les média. Sans doute la létalité du virus (moins de 2 %) n’est pas redoutable. La grippe fait pire. Mais sa vitesse de propagation, son pouvoir de désorganisation et les fantasmes qu’il suscite rencontrent un écho dans des esprits déjà travaillés par le syndrome victimaire. Des tensions populistes, la méfiance envers l’autorité, le commerce, le tourisme et les voyages en avion en résulteront sans doute. Pas très convivial tout ça…

* 23 février – Violence noire-brune. Si ce n’est que l’assassin est un banquier (!), le massacre de migrants musulmans dans deux bars à chicha, à Hanau, n’est pas anecdotique.  Il succède à un meurtre d’élu et à toute une série d’agressions aveugles qui ont accompagné la ré-émergence des néo-nazis en Allemagne. Si le populisme à front bas affecte, indifféremment, les deux extrêmes du spectre politique, l’obsession psychotique d’éradiquer « l’autre » – point final et rien d’autre – exprime un syndrome d’extrême droite. Le jihadisme et le néo-nazisme appartiennent à cette même folie furieuse. Ce blog a déjà dit que ces deux sectes terroristes s’épaulent bien plus qu’elles ne se combattent. Point d’autre vraie riposte que de consolider la démocratie.

* 22 février – Votez nucléaire ! Sous la férule du Conseil des gardiens de la Constitution, le dépouillement des élections législatives se poursuit en Iran. Au sein du prochain Majlis, les conservateurs sortiront vainqueurs, avec environ 60% des sièges. Une partie des candidatures réformistes ayant été invalidées, la motivation des électeurs, privés de choix, a été très inégale. Médiocre, la participation est restée en-deçà de 50% et, à Téhéran, l’abstention a été particulièrement forte. Elle ouvre un moyen de résistance politique présentant peu de danger. La position « modérée » (mais, l’est-elle ?) du président Rohani va être affaiblie face aux intégristes du clergé et aux gardiens de la Révolution. Les sanctions imposées par D. Trump, ses menées déstabilisatrices génèrent, en Iran, une évolution symétrique au populisme américain. Beau gâchis !

* 21 févrierOn vous a à l’œil ! L’opération,  « Thesaurus » puis « Rubicon », a été le coup du siècle en matière d’espionnage. La CIA et le BND allemand ont ainsi surveillé pendant des années plus de 120 pays à, travers Crypto AG, une société suisse spécialisée dans le chiffrement des conversations, leader mondial du secteur. Dès 1967, ils l’avaient rachetée en secret et espionnaient par ce biais des membres de l’OTAN, l’Iran, les juntes militaires d’Amérique latine, l’Inde et le Pakistan, et même le Vatican, révèle la radio-télévision suisse SRF. Depuis peu, ils l’ont revendue. Rassurez-vous la surveillance de masse se porte toujours très bien.

* 20 février Valse-hésitation. Les USA et l’Afrique, ce n’est plus le « shit hole » raillé par D Trump mais, avec la tardive tournée de M. Pompeo, un espace de « containment » (endiguement) matière à bégaiement pour la diplomatie américaine. L’électeur américain s’en désintéresse ferme (« le Sahel… c’est au Moyen-Orient ? »). Quel est l’ennemi ? La Chine et  peut-être la Russie (ce serait « vendable ») ou bien le jihadisme (qui ne menace pas l’Amérique) ? Qui sont les enquiquineurs ? Les Français, qui veulent mouiller le Pentagone dans leur petite guerre au Sahel et les Africains de l’Ouest, qui n’acceptent aucun désengagement. En attendant les élections, on retire donc des troupes du Niger, de Djibouti (les électeurs veulent ça) et on les remplace discrètement par des conseillers sous contrat (il faut bien prendre le relais de la coopération militaire française, nulle car inféodée aux chefs locaux africains !). Puis, on verra.

* 19 février – Banquiers-filous.  L’U.E porte les îles Caïmans, territoire britannique d’outre-mer, sur sa liste noire des paradis fiscaux. L’archipel, qui figurait avant sur la liste grise, s’était engagé à remettre de l’ordre dans son secteur bancaire, avant le 1er janvier 2020. Mais en vain. Trois semaines après le Brexit, on peut y voir un avertissement lancé au Royaume-Uni, s’agissant du premier territoire d’un Etat membre ou ex- membre ajouté à la liste toxique. L’accompagnent le Panama, les Seychelles et Palaos, portant le total des « paradis » à douze entités juridiques. Les précédaient les Samoa américaines, les Fidji, Guam, Oman, le Samoa, Trinité-et-Tobago, les Îles Vierges américaines et le Vanuatu. L’épargne planquée est hautement contagieuse, tel le coronavirus.

* 18 févrierPas d’armes, pas de pauvres ! L’Union européenne s’apprête à déployer au large des seules côtes orientales de la Libye, une nouvelle mission aérienne et navale avec une composante terrestre. Il s’agit de bloquer les livraisons d’armes aux belligérants locaux. Six avions et bateaux seront déployés dans ce but. L’Autriche dénonce cependant un risque d’ »appel d’air » de migrants, si les bâtiments européens devaient porter secours à des exilés tentant de rejoindre l’Europe. En tel cas, l’opération serait suspendue. Plus question, en effet, de renouveler la mission humanitaire Sophia interrompue depuis le printemps 2019, ni d’opérer dans des eaux fréquentées par les passeurs. D’éventuelles rencontres avec des naufragés, si elles se produisaient quand même, impliqueraient une prise en charge par le pays du pavillon du navire avec, à défaut, une rotation des ports de débarquement. Adieu, droit international !

* 17 févrierBlog critique ? Ce blog s’abstient habitue,llement de traiter de politique intérieure. Mais, observées en tant que reflets du « système », les fragilités internes deviennent un paramètre de la géopolitique. En Allemagne, Annegret Kramp-Karrenbauer, la dauphine d’A. Merkel est éclaboussée par la collusion  de la CDU en Thuringe avec l’extrême droite. Elle explose en vol. En Italie, M. Salvini, le précédent « homme fort » au pouvoir, soigne sa posture de mis en examen (pour séquestration de naufragés) pour mettre en cause la Justice. En République d’Irlande, le Sinn Fein, ancienne vitrine politique de l’IRA, effectue une percée spectaculaire aux législatives, y stimulant la volonté de « récupérer » l’Ulster. En France, les trois urgences sous la main d’A. Busyn, ministre de la Santé et des Affaires sociales – retraites, coronavirus, hôpitaux en crise – s’évaporent devant l’impératif électoral d’un nouveau casting pour les municipales à Paris : elle se réincarne précipitamment en parachutée du Président.

*16 février Victimes civiles de l’armement français. L’appel à mobilisation contre la venue du Bahri Yanbu en  France n’a pas empêché ce navire de charger du matériel militaire canadien et français à destination de l’Arabie Saoudite. Avec le risque majeur que ces armes soient utilisées pour alimenter le conflit au Yémen  ce qui est contraire aux engagements internationaux pris par la France.

*15 février – Alerte. La crainte d’un conflit entre grandes puissances, que ce soit en Europe ou en Asie, est à l’origine de la renaissance des réflexions sur l’usage possible d’armes nucléaires dans une optique tactique ou dans une logique de coercition. Deux travaux récents, publiés par la Rand, permettent de s’interroger sur la plausibilité des stratégies d’emploi précoce des armes nucléaires dans un conflit. Même l’équilibre de la terreur s’est pris un coup de vieux  !

* 14 février – Pestiférés sous le radar En Chine,  une application permet à tout un chacun de détecter, sur le GPS de son smartphone, les personnes de son voisinage infectées par le coronavirus. En Europe, la politique de « dissuasion » des migrants (pauvres) et demandeurs d’asile pousse à la clandestinité des dizaines/centaines de milliers de déboutés, « sans droit » et autres « fugitifs » que les gouvernements veulent occulter à l’opinion. Le jour où le virus touchera cette nébuleuse abandonnée à elle-même, c’est une bombe sanitaire qui explosera.  Terrible retour de bâton sur notre inhumanité !

*13 février – Communauté internationale, y-es-tu, que fais-tu ? A New-York, le Conseil de sécurité vote une résolution réclamant un cessez-le-feu durable en Libye. Il est demandé au secrétaire général de l’ONU d’en proposer les moyens de contrôle et aux Etats concernés de cesser toute interférence dans la guerre civile libyenne. Il s’agit de mettre en œuvre les conclusions du sommet de Berlin du 19 janvier. Un mois presque pour formaliser une décision déjà prise…  C’est que la Russie s’est abstenue et a bloqué le débat, récusant toute mention de la présence sur place de mercenaires  (les milliers de combattants de la société Wagner, mis en place par Moscou). Poutine était signataire des décisions de Berlin. Mais, qu’importe, Moscou soutient militairement le « maréchal » Haftar, sans assumer ouvertement ses choix. Des méthodes de voyou, indignes du statut de membre permanent de Conseil de sécurité.

* 12 février – S’intéresser encore à la politique US ? Avec 25,7 % des suffrages, Bernie Sanders gagne la primaire du New Hampshire, mais de peu devant Pete Buttigieg (24,4 %). En troisième position, la centriste Amy Klobuchar fait un score remarqué, tandis que Joe Biden s’effiloche. La course à la nomination sera-t-elle plus serrée que prévu ? Pour l’heure, l’émergence d’un « challenger » réellement capable de faire tomber D. Trump n’est pas acquise.

* 11 février – Hostilités sournoises. Au moins cinq soldats turcs, déployés sur la base aérienne de Taftanaz dans la province d’Idleb, tués par des tirs d’artillerie du régime de Bachar al-Assad. En représailles, Ankara aurait « neutralisé » plus de 100 soldats syriens. Ces affrontements surviennent, pour la seconde fois, alors que des négociateurs russes tentent à Ankara de limiter la casse. Plus de 700.000 civils de cette province  »rebelle », chassés par les combats, errent dans un dénuement absolu et dans l’indifférence des deux belligérants-agresseurs. C’est pour les sauver, eux,  qu’il faudrait recourir à la force. Mais qui ?

* 10 février – Reprise du travail. Ne pouvant plus retarder le retour des congés du Nouvel An lunaire, les autorités chinoises en donnent le signal. Mais elles appréhendent une remontée virale du 2019-nCoV., en dépit de sa relative stabilisation en deçà de 3000 nouveaux cas / j. C’est près d’un Md de voyageurs qui se croisent donc sur la voie publique avec un risque réel de surcontamination. La mort du lanceur d’alerte réprimé, le Dr Li Wenliang, fait bouillonner l’internet et met à l’épreuve la propagande officielle, nerveuse et malhabile comme toujours. Un mois de perdu qui aurait pu servir à endiguer la maladie dès ses débuts ! A Belleville et dans le 13 ème, le China town parisien se fait tout petit et évite les regroupements publics. Pourquoi cette forme de « culpabilité ethnique » infondée ? Peut-être parce qu’il y a des imbéciles aux yeux tout ronds pour regarder de travers les yeux en amende… La bêtise, elle aussi, est contagieuse.

* 9 février – Lambada géopolitique. La principale menace militaire pesant sur le Brésil  d’ici 2040 concernerait son contrôle sur l’Amazonie… face à la Guyane française. C’est la thèse avancée par le ministère de la Défense du Brésil (« Scénarios de défense 2040 »), que rapporte le quotidien Folha de Sao Paulo. Paris pourrait « formaliser, en 2035, une demande d’intervention de l’ONU » dans les territoires de la tribu indigène Yanomami, à la frontière avec le Venezuela, avec « une grande mobilisation de forces françaises en Guyane ». Terrible hypothèque sur la souveraineté du Brésil, qui, le pauvre, a plus de 730 km de frontières communes avec son potentiel agresseur. Le populiste J. Bolsonaro a furieusement besoin d’un ennemi extérieur…

* 8 février – Doctrine nucléaire. E. Macron vient d’exposer la sienne : juste suffisance ;  désarmement global, progressif et vérifiable ; non-emploi de l’arme en ordre de bataille; frappe unique et limitée d’avertissement de l’agresseur. Mais qu’il est difficile d’obtenir des partenaires européens de participer à une réflexion stratégique ! Ce, même quand le désengagement américain de l’OTAN, la mise entre parenthèse des traités de contrôle des arsenaux par Moscou et Washington et le Brexit placent pratiquement l’outil de dissuasion français au cœur la sécurité continentale. Sans vouloir désarmer la France, les populations voisines ne veulent pas avoir à entrer dans la logique du nucléaire. Leurs dirigeants s’y intéresseraient plus si l’Arme n’était pas, par définition, sous la main du seul président français. Paris souhaite faire oeuvre de pédagogie et préparer ses partenaires à deux échéances : en avril (conférence d’examen du TNP), produire une déclaration commune sur la fonction défensive de l’Arme puis, lors d’un sommet du P5, relancer la non-prolifération et obtenir que chaque puissance clarifie sa doctrine.

* 7 février – Un sommet, pour qui, pour quoi ? Moscou a appelé récemment à un sommet exceptionnel des cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies. E. Macron en réclame la paternité, invoquant les responsabilités partagées dans « l’ordre international, qui tient par le droit, la légalité et le respect de chacun. » En cette année de célébration du 75e anniversaire de l’ONU, cela ferait sens. Pour la Russie, il s’agi de magnifier son statut de puissance et de faire oublier son exclusion du G8, du fait de l’annexion de la Crimée en 2014. Mais, sur le fond, comment s’entendre sur un agenda à  5 , alors que Moscou explique le désordre actuel par l’interventionnisme  américain, depuis la guerre au Kosovo (1999) jusqu’au retrait de l’accord sur le nucléaire iranien (2018), en passant par la guerre en Irak (2003). L’incrimination peut être retournée, en évoquant l’annexion de la Crimée, la guerre dans le Donbass ou les bombardements de populations civiles en Syrie. Au Conseil de Sécurité, la Russie pratique, avec la Chine, une obstruction systématique sur le dossier syrien, opposant son veto, à quatorze reprises, à toute résolution humanitaire. Vers un sommet « spectacle », en faux semblant multilatéral et sans avancée sur le fond ?

* 6 février – Tombés dans l’oubli. Dans la région syrienne d’Idleb, le régime de Bachar al-Assad mène, avec le soutien de l’aviation russe,  une offensive pour reconquérir l’ultime bastion dominé par les jihadistes et par les rebelles. En deux mois, les combats ont fait un demi-million de déplacés. L’offensive a, de plus, provoqué des accrochages meurtriers entre soldats syriens et mercenaires envoyés par la Turquie, laquelle occupe une large bande territoriale du nord de son voisin. Le réflexe américain d’appuyer  »l’allié » turc est, pour le moins, mal inspiré. Est-ce uniquement parce que la Russie s’est placée du côté adverse ?

* 5 février – « Justice ». Sur toile de fond de décompte chaotique de la primaire démocrate dans l’Iowa, D. Trump plastronne lors de son discours sur l’état de l’Union. C’est surtout que le Sénat – Républicain – s’achemine vers un verdict d’ « acquittement » pour les charges accablantes retenues dans son procès en destitution. Les témoins à charge n’ont pas pu parler. Une manœuvre partisane peut-elle museler le besoin de justice ?

-Beaucoup trop de voix s’inquiètent des difficultés rencontrées par l’économie chinoise en conséquence du coronavirus (nos smartphones, moins nombreux ou plus chers en magasin ?) mais trop peu sympathisent avec ces dizaines de millions de Chinois enfermés, oubliés, très mal soignés et soumis à la tyrannie des petits chefs locaux du Parti. Leur vie est un enfer. On peut même dire qu’ils sont sacrifiés à la perpétuation du Pouvoir orwellien à Pékin.

* 04 février – Drôle d’atmosphère ! Le croirez-vous : 73 % des Chinois perçoivent le changement climatique comme le plus grand défi pour leur nation !…  tout en plaçant l’emploi comme leur priorité n° 1 (98  %). Aux États-Unis, ils sont seulement 39 %. Les Européens sont, eux, 47 %, avec, en tête, les Allemands, les Néerlandais, les Irlandais, les Autrichiens et les Danois. Pour 39 % des Européens l’emploi est primordial. Mais, ils estiment à 82 % que le changement climatique aura un impact sur leur vie quotidienne (76 % aux États-Unis). Ils sont 24 % à penser que le dérèglement climatique va les obliger à changer de lieu de vie et même 41 % chez les 15 – 29 ans ! Malheureusement, les « bloqueurs » de transition restent plus nombreux.  Urgence et conscience, qui va assumer les responsabilités : les citoyens, les entreprises, les Etats, les institutions européennes, ce blog ?

* 03 février – Géopolitique des victimes. Onze hauts fonctionnaires avancent des propositions sur la gestion des exilés sur le territoire français. Ces malheureux ne sont pas moins importants que les gesticulations de l’Etat.  Cela commence par la liberté de ne pas tenir compte de l’absurdité du « système Dublin », de revoir de fond en comble le rôle de l’UE et d’accepter d’examiner toutes les demandes d’asile présentées en France. Puis de laisser travailler, en particulier dans les secteurs en tension, ceux qui, quelle que soit leur motivation, en ont besoin pour sauver leur dignité. Enfin, de pondérer les « pleins pouvoirs » exercés par le ministère de l’Intérieur au sein d’enjeux manifestement interministériels. Il y a encore des îlots de bon sens.

* 02 février – « Surge », à la française. La Défense annonce que l’effectif de Barkhane sera porté de 4500 à 5100 hommes, pour une part déployés dans la zone des trois frontières et pour une autre, incorporés au G 5 Sahel. Le contraire des intentions d’E. Macron, fin-décembre.

* 1er février – Trade, not aid. D. Trump promulgue le nouvel accord de libre-échange avec le Canada et le Mexique, négocié pendant de longs pour remplacer l’ALENA de 1994. En principe, cela devrait éviter une nouvelle guerre commerciale intra-nord-américaine autour des délocalisations d’entreprises, sauf que ce cadre essentiel pour des centaines de millions d’agents économiques repose totalement sur les humeurs fantasques de l’Ubu roi de Washington. Sous n’importe quel prétexte, les querelles peuvent donc resurgir à son initiative. Mais, si les marchés s’en contentent, après tout…

* 31 janvier – Dérive des continents. Tchak ! Les amarres sont (symboliquement) tranchées avec le continent. Les machines sont mises en route : nationalisme étroit, nostalgies impériales, libéralisme agressif, dumping égoïste et poussée populiste. Reste à adopter un cap de croisière pour le navire U.K. L’état d’esprit à bord comme pour les autochtones restés à terre, va être fait d’aigreur sur à peu près tout. Les intérêts chauvins vont s’opposer, corporation par corporation, lobby par lobby, citoyens contre citoyens. Certes, l’intention professée est de sauvegarder un voisinage heureux entre alliés. Elle pourrait bien se trouver démentie par la surenchère de disputes douloureuses et insolubles contenues dans la genèse-même du Brexit.

– L’OMS qualifie l’épidémie de coronavirus d’urgence de santé publique de portée internationale.

* 30 janvier – Break down.  Après la ratification parlementaire de la décision de divorce, liturgie discrète, à Londres comme à Bruxelles, pour le départ britannique des institutions communautaires. Au-delà, pour la transition à mettre en place – quelques 700 domaines de relations à négocier – le cas suisse fait figure de précédent. Les deux partenariats avec l’UE fonctionneront-ils en vases communicants ? Berne avait adhéré en 1992 à l’Espace Economique Européen, pour se voir aussitôt désavoué dans les urnes. Depuis, les relations avec l’UE suivent un cheminement strictement bilatéral, sans empathie, à travers toute une série d’accords.

– Le choix éventuel d’un Brexit dur pourrait réactiver le contentieux avec Berne autour de la libre-circulation des personnes, corollaire de l’accès au grand marché unique. Les relations  avec la Confédération se sont dégradées, depuis 2014, du fait de l’adoption d’une votation limitant l’immigration. Les Hélvètes se prononceront à nouveau, en mai, sur une initiative xénophobe. En se gardant de rendre les échanges avec des tiers plus avantageux pour ceux-ci qu’entre ses propres membres, Bruxelles s’attellera, avec Londres, à un partenariat  »de rechange » avant de renouer avec Berne. Bon courage, keep cool !

* 29 janvier – Poudre aux yeux. Rien à dire de neuf sur le « plan de paix du siècle pour Israël et la Palestine » concocté par le gendre de D. Trump : chèque en blanc pour la colonisation, l’annexion, l’accaparement de Jérusalem, par la partie israélienne. C’est surtout un gadget électoral pour faire de Nétanyahou (mis en examen) le « Sauveur d’Israël », et, de Trump (mis en accusation pour abus de pouvoir), « l’Homme qui dompte les crises ». Balivernes ! Mais le peu de critiques émanant des gouvernements arabes (Arabie, Egypte, Jordanie, EAU, Soudan…) interpelle. Les Palestiniens, divisés, affaiblis et traumatisés,  semblent être sortis de l’Histoire.

* 27 janvier – Vaguelette brune. Choux blanc populiste : la prospère Emilie-Romagne italienne, identifiée comme la prochaine proie juteuse de la Ligue de Matteo Salvini, reste joliment rose. Sous l’étendard du Parti démocrate (50 % des voix), cette place forte de la gauche italienne a reconduit S. Bonaccini à sa tête. Il a bénéficié du soutien des « Sardines », collectifs de jeunes mobilisés pour défendre la démocratie. Certes, la Ligue progresse à 44 %. Mais la marche triomphale sur Rome, promise par Salvini, débouche sur une nouvelle (brève) traversée du désert. Fallait-il alors prophétiser un grand basculement italien – puis européen – vers un néo-fascisme continental ? Attention aux prédictions auto-réalisatrices des médias !* 26 janvier – Brexit’s coming !  Vendredi, la Manche cessera d’être une mer intérieure européenne pour devenir une enclave globo-britannique. Mais, avec le maintien « unilatéral », au moins une année encore, du cadre des échanges avec l’UE, certaines amarres demeureront. De quoi attiser l’impatience et l’agacement, des deux rives : normes inchangées, états d’esprit divergents, contentieux assurés, populismes en hausse et Europe rabougrie. Pas fameux !- La « full story » sur l’Année du coronavrus  (Bonne année du Rat !) : https://oursongeopolitique.blog/2020/01/24/2020-annee-du-coronavirus/

* 25 janvier – Faux-derchisme. Snobant son procès en destitution devant le Sénat, D. Trump flatte sa base évangélique en s’adressant à la Marche pour la vie :  »Chaque enfant est un don précieux et sacré de Dieu »; il luttera à mort contre le droit à l’avortement, acquis depuis 1973. On sait le sort qu’il a réservé aux enfants des migrants illégaux latinos, parqués comme des animaux et éloignés de leurs familles. On connaît ses bas instincts à l’égard des femmes. Il rappelle, à l’occasion, son penchant pour la peine de mort (qu’il a rétabli au niveau fédéral). Saisi de fièvre électorale, le voilà répudiant sa position initiale pro-IVG ! A deux pas de là, le Sénat examine un certain réquisitoire …

* 24 janvier -Poudrière libyenne. Inquiets, les représentants d’Algérie, de Tunisie, d’Egypte, du Tchad, du Soudan et du Niger voient la crise en Libye menacer de plus en plus l’équilibre de leur région. S. Boukadoum, ministre algérien des Ae, relaie leur appel au « respect la Libye en tant qu’État uni » et leur « rejet de l’ingérence étrangère », appelant à associer l’Union africaine et l’ONU à un règlement. Pour sa part, Ghassan Salamé, le représentant de l’ONU en Libye, rappelle les faits : « Il y a aujourd’hui une bonne dizaine de nationalités de combattants qui interviennent dans la bataille, des experts militaires, des mercenaires, des combattants idéologiques, des troupes régulières ». Leur retrait serait à l’agenda de la rencontre prévue à Genève fin janvier. Allez expliquer ça à Erdogan, Poutine… et à la DGA française !

– Corona virus en Chine : l’OMS patauge dans ses prescriptions, prise dans un bras de fer politique entre son siège et les Etats concernés. C’est précisément pour ménager l’égoïsme des Etats que les urgences d’intérêt général (santé, climat, alimentation, réfugiés, enfance…) sont confiées à des agences sans réelle autorité. A quand un Conseil de sécurité sociale, humanitaire et environnementale, décidant à la majorité, comme son homologue politico-militaire ?

* 23 janvier – Sras une méchante pandémie ? J’ai vécu l’infection pulmonaire SRAS à Canton, à la veille du Nouvel An 2003. Je l’ai même contractée, le mois précédant sa propagation éclair, sous une forme bénigne persistante. Informé du coronavirus par un médecin gabonais diplômé de la faculté de locale, j’ai lancé l’alerte dans la communauté expatriée puis, lorsqu’on s’est tous retrouvés bloqués en quarantaine, géré le site internet qui a maintenu le lien au sein de celle-ci et avec Hong Kong. Les autorités locales ont disparu de février à mai : bureaux vides, téléphones débranchés. Elles-mêmes consommaient les animaux exotiques vendus sur le marché-zoo alimentaire de Qing Ping, mais surtout elles espéraient que le secret aiderait à sauvegarder le flux d’investissement occidental. A Paris, le ministère de la Santé interdisait que l’on corresponde, même au téléphone, avec les consulats de la zone infectée et les 5000 Français pris au piège. Pas un commentaire, conseil ou encouragement, même de l’Ambassade, entre février et juin, en réponse à mes points de situation quotidiens. J’avais commis deux crimes : mentionner le SRAS risquait de dissuader J-P Raffarin, alors premier ministre, d’effectuer sa visite officielle à Pékin, ville contaminée bien plus tard. L’Amba y voyait un « sabotage ». J’avais adressé directement à l’OMS les observations des médecins expatriés sur la maladie et en quelque sorte violé la souveraineté du Quai d’Orsay. Ca recommence, cette fois depuis Wuhan. A-t-on appris entre-temps en Chine comme en France ? L’article.

* 22 janvier – Greta et Goliath. « Vous avez dit : ‘’laissez, nous allons régler ça … ne soyez pas si pessimistes’’. Résultat : rien. Le silence : des mots vides et des promesses qui donnent l’impression que des actions suffisantes sont prises ». Les propos mesurés de Greta Thunberg à Davos resteront autrement plus crédibles que les rodomontades provocatrices de D. Trump sur le « modèle économique parfait » qu’il est censé incarner. En réalité l’économie mondiale échappe à tout contrôle et se fragilise à vue d’œil, tandis que la crise sociale se généralise. Se débarrasser promptement de son procès et se faire ré-élire sur des chimères toxiques, c’est tout ce qui compte pour Goliath.

* 21 janvier – Malheureuses jeunesses ! C’est frappant au Liban (500 blessés hier), en Irak, en Iran, en Algérie, au Soudan, etc. : les jeunes du Grand Moyen-Orient n’en peuvent plus de ce vieux monde dont ils cherchent à faire table rase. Renouveler une classe politique incapable et corrompue, se dégager des logiques de pouvoir communautaires ou féodales, stopper les ingérences extérieures et trouver le chemin d’une démocratie prospère : on ne peut que sympathiser avec ces aspirations. Mais héroïsme n’est pas organisation et on pressent que la force rétrograde prévaudra, pour un temps, sur leurs beaux rêves.

* 20 janvier – Promesses pour qui voudrait furieusement y croire. La conférence de Berlin, sous mandat allemand et onusien, n’empêchera pas la Libye de devenir une « seconde Syrie », chosifiée par des puissances extérieures, droguées qu’elles sont par leurs délires géostratégiques, leurs gourmandises d’armes ou de pétrole, leurs calculs tordus. Comme toujours, les Libyens eux-mêmes n’ont pas bougé le petit doigt pour la paix. Cessez-le-feu durable, respect de l’embargo sur l’armement, fin des ingérences étrangères… balivernes et Cie ! Sous la haute direction de V. Poutine, la communauté internationale fait de la figuration en danseuse manchote unijambiste. Pas aphone, toutefois  : la RFA sauve l’honneur. La France cessera-t-elle de spéculer sur tous les tableaux (la diplomatie « vendeuse » de la DGA) ?

* 19 janvier – Chammal. Lors de ses vœux aux armées, E. Macron annonce le déploiement du groupe aéronaval du Charles-de-Gaulle, dans le cadre de la lutte contre Daech. La France conduit cette opération depuis 2014, à l’appel de l’Iraq. Elle la poursuit malgré la chute du califat. Mobilisant 11 rafales et leurs équipages stationnés en Jordanie et aux Émirats arabes unis ainsi que des éléments d’artillerie étoffés (servant les canons Caesar), Chammal s’inscrit dans la coalition interalliée ‘Inherent Resolve’ rassemblant plus de 70 nations. Enfin, 160 instructeurs français sont déployés à Bagdad pour des actions de formation, de conseil et d’assistance. L’Iraq est en pleine révolte contre les frappes américaines, contre sa propre classe politique et (pour certains), contre la mainmise de l’Iran. Comment cette population révoltée prendra-t-elle l’intervention sur zone du Charles-de-Gaulle… et qu’en savent les Français ?

* 18 janvier – Salade de nœuds. Libye. Demain : n ème conférence de règlement politique, à Berlin, succédant à un cessez-le-feu bancal signé à Moscou. Derrière le gouvernement Sarraj (Tripoli) : la Turquie avec force armement et soldatesque, l’ONU (désespérée), la France, du bout des doigts. Du côté du seigneur de la guerre Haftar (Cyrénaïque) : les Emirats arabes unis (et leurs drones armés), l’Egypte, les mercenaires russes, les forces spéciales françaises (pour le pétrole, contre les exilés ou ne sachant pas pourquoi ?), d’autres encore. Va-t-on vers un multi-conflit à la syrienne ? Russie, France, Egypte contre Turquie, avec la Grèce en renfort. L’UE est effacée de la carte. Pitié, ne dites pas que la Loi et l’Ordre doivent prévaloir. Ce n’est plus le sujet !

* 17 janvier – Républiques betteravières d’Europe. Retour à la brève du 15 janvier : l’ouverture d’un contentieux avec l’Iran se justifiait mais, en fait, le New York Times révèle qu’elle répond surtout à un chantage commercial opéré par D. Trump. C’était incriminer l’Iran ou subir des sanctions tarifaires américaines (voitures allemandes, produits du luxe, etc.). Piteux dirigeants européens qui cachent honteusement leur indigence et leur soumission !

* 16 janvier – Coups fourrés. L’actualité de court terme : Etats-Unis et Chine enterrent la guerre commerciale.  Les premiers sont censés arracher à Pékin 200 milliards d’export supplémentaire, sur le très long terme. Mais le long terme n’existe pas dans la recette « menace, frappe et deal théâtral » si spécifique de D. Trump. Quand la saison II de négociation arrivera (normes, investissement, contentieux), il sera depuis longtemps passé à une autre victime (l’Europe ?), à qui faire rendre gorge avec fracas. Il aura oublié la saison I, mais la guéguerre reprendra. Chez Poutine, c’est différent : changement de premier ministre opéré et de constitution en vue, dans un sens « IV ème République française ». Comme toujours, on décrypte mal ses intentions (récupérer, au sein d’autres institutions ad hoc », le pouvoir à la fin de son mandat en 2024 ?). Mais il s’y tiendra.

* 15 janvier – Rendre voix à la diplomatie. Londres, Paris et Berlin activent le mécanisme de règlement des différends inclus dans l’accord de Vienne de 2015, pour contraindre l’Iran à respecter ses engagements de non-prolifération nucléaire. Ceci pourrait aboutir à rétablir des sanctions de l’ONU contre Téhéran. E. Macron, après avoirt tenté d’organiser une rencontre entre Trump et Rohani en 2019, resterait disposé à jouer les bons offices. Boris Johnson penche, lui, pour une sortie de l’accord, façon américaine (l’effet Brexit ?). La garde des sceaux évoque de façon informelle un « rapatriement » des jihadistes français coincés en Syrie et Irak. Première faille dans la doctrine absurde  « qu’ils meurent là-bas !! »

* 14 janvier – Aimez la France ! C’est le cri lancé par E. Macron recevant à Pau les présidents du Sahel. Mais ceux-ci ont-ils prise sur des populations mal gouvernées, rendues méfiantes et froissées par 7 ans d’intervention française contre la poussée jihadiste, sans résultat visible ? La déclaration finale prévoit de focaliser Barkhane sur la zone des trois frontières, d’établir un commandement conjoint avec le G 5 et de renforcer de 220 hommes le dispositif français. Macron s’est indigné de l’absence d’implication sociale et politique africaine dans la recherche de la paix. Vrai, c’est une fatalité plus terrible encore que la médiocrité générale des armées africaines, tournées vers la captation du pouvoir et des richesses ! Des militaires français submergés par l’ampleur du défi, des Africains inertes et défiants, des Américains annonçant opportunément à l’OTAN le retrait de leur Africa Command, des Européens qui soutiennent à reculons : au final, la recette d’un énorme Afghanistan continental, à venir.

* 13 janvier – L’alibi. Mettre fin au carnage de la bataille de Tripoli. Sous le double patronage Moscou (pour le « maréchal » Haftar) et d’Ankara (pour le régime « ONU-compatible » du premier ministre Saraj), les protagonistes Libyens devaient signer un engagement de cessez-le-feu chez V. Poutine. Pour de bon ? Non, bien sûr, vu l’absence totale de sens national dans ce pays-voisin de l’Europe et meurtri par celle-ci. Mais le but des deux parrains, déployant des mercenaires sur place et livrant des armes aux belligérants (malgré l’embargo de l’ONU), n’est pas tant humanitaire. Il s’agit de gérer la tension entre eux et de s’imposer comme les seuls arbitres, face à une Amérique « partante » et à une UE dépassée. Mais Haftar n’a pas signé.

* 12 janvier – Bonus démocratique. Confortable victoire électorale, à Taiwan, des Démocrates-progressistes et de leur candidate à la présidentielle, Tsai Ing-wen, reconduite pour un second mandat. Un an auparavant, Xi Jinping intimait l’ordre à ces « séparatistes taiwanais » d’intégrer la Mère-patrie communiste à la sauce « un pays, deux systèmes » ou d’être soumis par la manière forte. Les mots justes trouvés par Mme Tsai en faveur du statu-quo et le spectacle désolant de la démocratie refusée aux Hongkongais ont achevé de convaincre les électeurs que la voie spécifique taïwanaise était à sauvegarder. Sans doute même, Pékin devrait s’en inspirer.

* 11 janvier – L’aveu. Le président Rohani reconnaît la responsabilité iranienne dans la destruction de l’avion ukrainien, présente des excuses et annonce des sanctions contre les Pasdaran. Un geste honnête, qui pourrait saper l’autonomie insolente acquise par ceux-ci ?- La Russie obtient, aux Nations Unies, la limitation de l’aide humanitaire aux civils syriens.

* 10 janvier – Tir au pigeon. Il y a plusieurs décennies, une caravelle s’était abîmée près d’un centre de test de missiles, dans le sud de la France. Pendant la Guerre du Golfe, un Airbus iranien a été pris pour cible, par erreur et détruit en vol, par une frégate de l’US Navy. Un Boeing 747 coréen a été abattu, de même, par la chasse russe, rendue folle par les survols espions américains sur la Sibérie. Les mercenaires de Poutine en Ukraine ont abattu, par erreur mais sans grand remord, un vol civil malaisien. Aujourd’hui, on suspecte aussi qu’en frappant deux bases américaines en Iraq, les Pasdaran auraient abattu un B 737 ukrainien au départ de Téhéran : 176 morts innocents. Il faudrait retirer tout droit de survol hors de ses frontières à un Etat qui procède à un tir réel sans avoir préalablement sécurisé son espace aérien civil.

* 09 janvier – Pshiiiit ! Volées de missiles, dégâts limités, honneur lavé. Téhéran déclare avoir accompli ses représailles, Washington quitte le registre du coup de poing pour celui des sanctions (qu’ajouter de plus ?), la partie au bord du gouffre s’interrompt pour un temps. Ce n’est pas la paix des braves et la nébuleuse des factions armées pro-iraniennes n’a pas encore dit son dernier mot, mais le répit permet de reprendre souffle, surtout pour les marchés et l’Europe. Du coup, la guerre libyenne revient au premier plan,  sous patronage russe et turc…

* 08 janvier – Vengés ou pas, les mollahs ? La double frappe de missiles iraniens sur des bases américaines en Iraq (dont la souveraineté est à nouveau violée) ouvre un épisode de guerre psychologique, de bluff et d’embrouille. « 80 terroristes américains neutralisés », d’un côté, « All well, so far so good », de l’autre : Téhéran comme Washington jouent, pour leurs opinions, la force tranquille avec, à la fois, l’affirmation d’une action contrôlée sans volonté d’escalade et, en filigrane, l’évocation d’un recours aux extrêmes si « l’autre » s’aventurait encore à riposter. Un jeu maquillé, instable et propice à tous les dérapages. Trump et Khamenei s’enferment dans une double posture : immédiate, vis-à-vis de leurs bases populaires survoltées et, dans la logique froide de leurs intérêts d’Etat à plus long terme, là où l’économie iranienne est très vulnérable.

* 7 janvier – Calmer le jeu ? Washington est dans l’introspection et l’hésitation quant au départ de ses troupes d’Iraq. Le commandant en chef américain sur place a notifié un rapatriement prochain de celles-ci aux autorités intérimaires de Bagdad, mais le Pentagone l’a (mollement) démenti. Les alliés réclament que le dispositif OTAN se maintienne face à la menace d’une résurgence de Daech, ce qui serait aussi dans l’intérêt de Bagdad. A Bruxelles,  l’Alliance comme l’UE chantent les mérites de la pondération et de la désescalade, mais si les Européens invitent le ministre iranien des affaires étrangères à parlementer avec eux, Washington lui refuse l’accès au siège des Nations Unies et les élucubrations de D. Trump confirment un profond mépris pour le droit, le respect des civils et la souveraineté des (autres) Etats. La mission civile de l’UE en Iraq « estime » qu’elle restera sur place. Vu la fureur de la rue, en Iraq comme en Iran, à propos de l’exécution du général Soleimani, on peut douter que les messages d’apaisement soient rapidement suivis d’effets.

* 6 janvier – Emballement. En Iraq, les Etats Unis perdent l’appui (tacite) dont ils pouvaient se prévaloir dans la population chiite majoritaire, qu’ils avaient portée au pouvoir à la chute de Saddam Hussein. Les voilà « l’Ennemi n° 1 », comme en Iran, où la fureur de la rue appelle à venger la mort du général Soleimani. Partout dans la région, notamment au Liban, les relais de Téhéran exigent le départ « immédiat » des forces étrangères (dont le contingent d’instructeurs français en Iraq), ce que le parlement de Bagdad ratifie – au nom de la défense de sa souveraineté – dans un vote cinglant à l’égard de Washington. Les Américains, ciblés pour des attentats et dépassés par l’explosion de colère qu’ils ont provoquée, menacent Bagdad de « fortes sanctions » et invoquent les plans d’agression contre eux du patron d’Al-Qods (Soleimani) ainsi que le défaut de solidarité des Européens à leur égard dans l’attaque ciblée du 2 janvier. Parmi ces-derniers, le Royaume Uni réagit avec compréhension (l’exécution de Soleimani relevait de la « légitime défense »), tout en appelant, comme la France et l’Allemagne, à « calmer le jeu ». Paris affirme son « entière solidarité avec ses partenaires régionaux », formulation ambiguë destinée à ménager tout le monde. E. Macron appelle néanmoins Téhéran à mettre fin aux activités déstabilisatrice de la force Al Qods à travers la région.  Aucune chance d’être entendu … mais l’Iran, qui a repris son entière liberté d’enrichir l’uranium, ne se dégage pas du contrôle de l’AIEA. Un signe d’une volonté de garder une porte entrouverte ?

* 05 janvier – Fuite en avant. Hier, par le truchement de la Suisse (qui la représente à Téhéran), Washington cherchait à s’assurer que la riposte iranienne à l’exécution du général Soleimani resterait « proportionnelle ». Puis l’OTAN retire d’Iraq, en catastrophe, ses instructeurs et conseillers, devenus des cibles. Alors, D. Trump menace l’Iran et ses réseaux extérieurs de « représailles massives à ses représailles » : 52 sites stratégiques de ce pays seraient promis à destruction. Et pourquoi pas faire sauter la planète ? Le bluff crée un sinistre engrenage…

* 04 janvier – Para bellum. Au lendemain de l’assassinat de Qassem Soleimani à Bagdad, une nouvelle frappe aérienne aurait visé une milice chiite, au nord de Bagdad, faisant « des morts et des blessés », selon la police irakienne. Alors que la télévision publique irakienne attribue cette attaque à l’armée américaine, la coalition conduite par Washington dément toute frappe dans la région. Washington déploie 3 000 à 3 500 militaires supplémentaires au Moyen-Orient pour renforcer son dispositif armé. Ces militaires s’ajoutent aux quelque 700 soldats qui ont été envoyés au Koweït en début de semaine. Donald Trump assure ne pas chercher la guerre avec l’Iran. ll ‘y a plus besoin de la chercher : elle est là.

* 03 janvier – Attiser la guerre. L’exécution par l’aviation des Etats Unis du général iranienQassem Soleimani sur l’aéroport de Bagdad aura-t-elle un effet comparable à celle de l’Archiduc d’Autriche à Sarajevo, en 1914 ? Tel un cow-boy basique jouant du revolver au saloon, D. Trump se montre fier de son geste insensé, dont les conséquences peuvent incendier un Moyen-Orient déjà en incandescence. Quant à l’Afrique du Nord, le quitus du parlement d’Ankara à une intervention armée en Libye, la présence sur place d’une milice syrienne à la solde d’Erdogan et les mises en garde de l’Egypte promettent aussi un sérieux grabuge. Europe, où es-tu, porteuse de paix ou supplétive des puissances pétrolière ? Le déclin des énergies carbonées surviendra-t-il abrupt (à-« brut ») ?

* 02 janvier – Démocratie. Taiwan adopte une loi « anti-infiltrations » interdisant à des forces étrangères « hostiles » de faire campagne ou lobby, d’effectuer des financements politiques ou de diffuser des infox en lien avec les élections, notamment la présidentielle attendue le 11 janvier. Le Parti démocratique progressiste (PDP) de Mme Tsai Ing-wen, présidente en exercice et bête noire de Pékin, a de bonnes chances de faire réélire sa candidate lors de ce scrutin sur toile de fond des troubles de Hongkong. Il faudra aussi se méfier de facebook (cf. campagne pro-Brexit au R.U.)

* 1er janvier 2020 – Joyeux Nouvel An ! Kim Jong-un annonce la fin du moratoire que la Corée du Nord observait sur les essais nucléaires et de missiles balistiques intercontinentaux. A Hongkong, près d’un million de manifestants envahissent les rues à l’appel du Front civique des droits de l’homme. Quelques 400 d’entre eux sont arrêtés. Réveillon du Nouvel an « sportif » sur les plages, pour des milliers d’Australiens fuyant les incendies . Une opération de sauvetage est lancée par la marine et l’armée de l’air, pour leur venir en aide.

* 31 décembre – Bévue de la Saint Sylvestre. En réponse à une attaque à la roquette du Hezbollah contre une base américaine en Iraq, Washington lance des bombardements massifs. Pour la rue irakienne, déjà remontée contre ses dirigeants de Bagdad et contre l’Iran, c’en est de trop. L’Amérique se disqualifie. Son ambassade est brièvement investie par une milice pro-iranienne puis repousse l’assaut. En réponse, le Pentagone annonce envoyer 750 soldats supplémentaires au Moyen-Orient.

* 30 décembre – V2 en cadeaux. Pyongyang a promis à D. Trump un « cadeau de Noël », du style « test de missile stratégique longue portée ». Kim Jong-un a adressé aux Etats Unis un ultimatum d’ici la fin de l’année, pour qu’ils changent d’attitude à l’égard de l’arsenal nucléaire de son pays. Sans rapport : à Moscou, on vante la mise en oeuvre de « l’arme absolue » :  l’Avangard, qui vole à Mach 20 et jusqu’à Mach 27, serait capable de changer de cap et d’altitude. Selon M. Poutine, il pourrait contourner tous les systèmes antimissiles existants. Si vous dites « relance de la course aux armements », vous êtes un Poutinophobe primaire. On attend de vous que vous ayez la trouille, c’est tout.

* 29 décembre – Idlib (Syrie) : un collectif citoyen s’exprime dans Le Monde. Extraits: « Au nord de la Syrie, un déluge de bombes s’abat sur des millions de civils rassemblés dans la région d’Idlib. Ces déplacés (…) ont fui les affrontements qui ravagent la Syrie depuis 2011, ou ont été conduits de force dans cet espace devenu piège de masse. Ce ne sont pas des victimes collatérales : ils sont visés comme tels par le régime. Ils se retrouvent pris au piège entre les djihadistes et les bombardements du régime de Bachar Al-Assad appuyé par l’armée de Poutine. Des coordonnées d’hôpitaux transmises par l’ONU, l’aviation russe a fait bon usage, bombardant soixante structures (médicales)…Nos dirigeants européens ont lâché tous leurs leviers d’action au profit de la Russie et des voisins régionaux : Iran et Turquie. Les appels à la trêve formulés publiquement par le président français à Brégançon ont été balayés en direct et tout aussi publiquement par Poutine.La non-application des décisions internationales a permis à Bachar Al-Assad de contourner les sanctions économiques en captant l’aide humanitaire, de plus en plus monopolisée à des fins claires : continuer la guerre … jusqu’à extinction totale. Le récent veto de la Russie et de la Chine à l’ONU aggrave le tout en empêchant l’aide transfrontalière. Cette débâcle est aussi la nôtre : c’est celle de notre monde, de l’idée de monde humain ». Rien à ajouter.

* 28 décembre – Nouveau lâchage. D’après le New York Times, Washington se prépare à une forte réduction de son engagement militaire en Afrique (actuellement, 7 000 soldats en zone subsaharienne et en Somalie). Ce pourrait entraîner un retrait complet du Niger, du Tchad et du Mali, incluant la fermeture de la base de drones d’Agadez, au Niger. Le Pentagone préfère se concentrer sur les défis stratégiques que posent la Chine et la Russie. Après le lâchage des Kurdes de Syrie, ce serait un coup bas, porté cette fois à l’engagement de la France au Sahel. Pour certaines missions opérationnelles et pour l’encadrement du G 5, Paris reste en effet dépendant d’un appui américain. A l’heure où la jonction se fait entre le Maghreb islamique, au Nord, et Boko Haram, au Sud, le Sahel, investi par les groupes jihadistes, relève de ces « guerres sans fin » dont D. Trump veut se débarrasser. De son côté, Berlin renâcle à s’engager plus franchement.

* 27 décembre – Pied de nez à l’Occident. L’Iran, la Chine et la Russie engagent des exercices navals conjoints – en principe « non-offensifs » – dans l’océan Indien et le golfe d’Oman. Pendant quatre jours, il s’agit de « montrer que l’Iran ne peut être isolé ». Ces manœuvres interviennent sur fond de fortes tensions dans le Golfe, depuis le torpillage, par Washington, de l’accord sur le nucléaire iranien et le rétablissement de sanctions contre l’économie de la République islamique. L’engagement de la Chine aux côtés de la Russie traduit un durcissement collectif envers l’Occident.

* 26 décembre – Guerres spasmodiques. Deux attaques jihadistes das la région d’Arbinda, au Burkina Faso : nombreuses victimes civiles et militaires. Selon le président turc, Erdogan, le Parlement d’Ankara votera en janvier une motion décidant l’envoi de troupes en Libye. Elles interviendront en soutien du gouvernement d’union nationale (GNA), reconnu par l’ONU, face aux forces de Khalifa Haftar, l’homme fort de l’est libyen, courtisé par la France. Où sont les bons, où sont les méchants ?

* 25 décembre et 31 décembre : En raison de l’arrêt de travail d’une catégorie d’ours géopolitique, ce blog ne sera pas en mesure d’assurer une totale continuité de son service pendant les réveillons. Il prie son unique lecteur de l’en excuser et de se tourner, en attendant, vers la musique et/ou la gastronomie. Joyeux Noël An !

* 24 décembre – Menaces d’apatridie. Après ce qui arrive aux Rohingyas, les 200 millions de musulmans d’Inde ont motif à s’inquiéter, de même que le Pakistan et le Bangladesh. La loi sur la nationalité, adoptée le 11 décembre, pallie les lacunes de l’état-civil indien en omettant simplement toute  »régularisation » pour les mahométans (contrairement aux autres minorités religieuses). La protestation est vive, et la répression a déjà fait 25 morts. Narendra Modi tente de se dédouaner de son virulent nationalisme hindou en « assurant » que  ceux qui peuvent prouver l’indianité de leurs ancêtres échapperont à l’apatridie (et l’expulsion ?). Mission impossible et propos hypocrites. Que reste-il de la laïcité de la « plus grande démocratie du monde » ?

* 23 décembre – Facétie du hasard. Mort subite du général Gaïd Salah, Chef d’Etat-major, « homme fort » du pouvoir militaire algérien. Une promotion inespérée pour le nouveau président mal élu, d’emblée libéré de son « tuteur » ? Une opportunité pour le mouvement populaire hirak ? Restez fidèle au blog pour obtenir la vraie réponse !- La France va créer en Côte d’Ivoire une académie anti-terroriste pour l’Afrique de l’Ouest : renseignement, conduite des opérations, défense des institutions. Ce ne sera pas l’équivalent africain de l’ex-Ecole des Amériques, à Panama, mais ce ne sera pas non plus une assurance contre la torture. De son côté, Barkhane se dote de drones tactiques armés (pilotés localement) : contrôle renforcé des mouvements des jihadistes (bien !) ET possibilité d’exécuter, sans combat ni procédure judiciaire, plus d’ennemis ciblés (!)

* 22 décembre – Emancipation. En Afrique francophone, l’Eco, indexé à l’Euro, va remplacer le Franc CFA. Les huit pays de l’actuelle zone franc en Afrique de l’Ouest couperont, dès 2020, tout lien technique avec le Trésor français. Ils géreront eux-mêmes leurs dépôts, la France n’offrant des garanties qu’en cas de crise monétaire. L’Eco pourrait à terme être assis sur un panier de devises. C’est la fin d’un anachronisme à la fois politique (rétablir un symbole de souveraineté africaine) et technique (c’est la BCE de Francfort, non la Banque de France, qui gère la devise utilisée en France). L’arrimage est redéfini mais pas rompu. La situation monétaire de l’Afrique centrale reste à préciser.

*  21 décembre – Saut périlleux, yeux bandés. Westminster adopte largement la « Loi de séparation » qui formalise la demande britannique de Brexit. L’opposition s’étant effondrée, Johnson est désormais tout-puissant, même si la moitié des Britanniques ne voulaient pas de lui. Bruxelles et les pays-membres de l’UE prendront acte, sans doute avant février. Affaire classée ? Non. Quel avenir attend, en effet, le Royaume Uni, voisin malgré lui de l’UE et qui s’est enfermé dans une vision populiste à courte vue ? L’électeur -type britannique n’en sait rien et préfère ignorer les conséquences de ses choix. Avec l’année ou plus de tractations difficiles qui s’annonce pour restaurer un semblant de partenariat avec le Continent, il va, plus que jamais, haïr Bruxelles. Triste absence de sens stratégique. L’électeur européen a le droit, lui, de décrypter son futur et d’y participer.

* 20 décembre – Ingratitudes croisées. A E. Macron, déplorant l’hostilité des populations sahéliennes envers Barkhane, Mahamadou Issoufou, président du Niger, rétorque :  » Les populations ne comprennent pas que la communauté internationale se détourne de la situation dans .. le Sahel… cette absence de solidarité… elles savent sa responsabilité dans la situation actuelle. Il ne faut jamais l’oublier, c’est quand même la communauté internationale qui a créé le chaos en Libye. Ce qui se passe dans le Sahel est une des conséquences du chaos libyen !… A plusieurs reprises, nous avons demandé à ce que la force conjointe du G5 Sahel … soit mise sous chapitre VII de la Charte des Nations unies. On nous l’a refusé… que la Minusma soit placée sous un mandat plus fort, plus robuste que le maintien de la paix. Là, également, nous ne l’obtenons pas. Nous avons besoin de plus de Barkhane… de plus d’alliés. Parce que ceux qui critiquent la présence française ou la présence des alliés dans le Sahel oublient que, sans l’intervention Serval, le Mali serait aujourd’hui sous le contrôle des terroristes ! Peut-être que le Niger aussi » ! Bien vu.

* 19 décembre – « Potus » incriminé. Aux Etats Unis, la Chambre des représentants adopte, par 230 voix contre 197, l’acte d’accusation de Donald Trump, l’homme le plus puissant du monde : abus de pouvoir et obstruction du Congrès. Le 3ème procès en destitution de l’histoire américaine s’ouvrira au Sénat, au printemps. Les Républicains font bloc derrière le président, dénonçant un « coup d’État masqué ». Pour les Démocrates, Nancy Pelosi évoque la menace que fait peser Donald Trump sur la démocratie. A ce stade, n’importe quel autre pays sombrerait dans la guerre civile. Pour le temps qu’il restera en place, quel sort, le Zeus du tweet – narcissique et outrancier dans la vengeance, comme il l’est – va-t-il faire subir au (détestable) « reste du monde » ?

* 18 décembre – Méchants poissons. L’OTAN s’inquiète de l’activité sous-marine russe en Arctique, Baltique, Mer Noire et Méditerranée. La flotte du Nord, basée à Mourmansk, déploie de façon continue, dix bâtiments de ce type dont huit à propulsion nucléaire. La Mer de Barents, rendue accessible par la fonte des glaces, est particulièrement « fréquentée ». Elle ouvre la voie à des ressources naturelles auparavant difficilement exploitables.  La Norvège s’est plainte au ministre russe, S. Lavrov, de cette ruée, face à laquelle l’OTAN veut renforcer ses moyens de détection. Depuis l’annexion de la Crimée, on spécule beaucoup sur les axes de progression du nouveau « glacis » stratégique de Moscou. La démonstration de force tient, en partie seulement, à la nécessité de tester des nouveaux systèmes d’arme. En fait, l’encerclement de l’Europe n’est pas que naval : il inclut aussi un arsenal renaissant d’euro-missiles, un soutien actif aux démocratures contre les institutions démocratiques, un grignotage territorial le long de la Mer noire, la cyber-guerre, l’achat de personnalités politiques, bref la « guerre hybride ».

* 17 décembre – Bourbier sahélien. Les Etats Unis entretiennent la même nervosité que la France face à la dégradation de la sécurité au Sahel, où les dirigeants du G 5 échouent à « traiter les causes du conflit ». En réponse à l’appel des présidents africains à davantage de coopération internationale, Washington souligne avoir déjà fourni (en vain ?) une aide de plus de 5,5 mds, en 2017-2018. Or, le conflit n’a reçu qu’une réponse militaire, qui reste loin de la « gouvernance inclusive » – la satisfaction des besoins essentiels – dont devrait bénéficier toutes les communautés de la Région. Suit la critique du peu de zèle du gouvernement malien à appliquer les accords de paix d’Alger, qu’il a signés en 2015.La rogne est bien identique à celle exhalée par E. Macron, « convoquant » les présidents africains à Pau (ce sera le 13 janvier). S’aligner sur le mépris de Trump pour les Etats africains serait une erreur psychologique. Même fondée, la stigmatisation n’opère pas.

* 16 décembre – 1/4 bonne. Le Mécanisme inclusif du Carbone (MIC) sera le fer de lance du Green New Deal (Pacte vert) européen. Mais, pour rendre compatible cette approche de la compensation carbone avec les règles de non-discrimination de l’OMC, le chemin va être tortueux et la contestation inévitable. Le concept, inspiré des bourses de compensation sur les marchés et aux frontières, s’appliquera aux biens massivement échangés, à contenu élevé en carbone et pas trop composites (ce serait trop complexe). Pour prévenir son contournement, il implique que les productions délocalisées hors-UE soient taxées sur leur différentiel de carbone par rapport aux mêmes produits manufacturés en Europe.- Taux de culpabilité (émissions CO2) : Europe = 9,6 % – Asie= 47,2 %, dont 29,6 % pour la Chine – États-Unis= 15 % – Amérique centrale et du Sud= 3,7 % – Afrique= 3,3 % – Moyen-Orient= 6,4% – Océanie= 1,3 %.

* 15 décembre – Persistance du « système ». Plus que la médiocrité de la participation, on retiendra du vainqueur de la présidentielle algérienne, Abdelmadjid Tebboune, qu’il incarne « le système » dénoncé par la population. Le général Gaïd Salah, dont il est le patron, restera l’Homme fort, autoritaire et omniprésent. Principal protecteur de l’ex-président Bouteflika, pourfendeur de la mafia des renseignements, accusateur de ses adversaires militaires empêtrés dans mille affaires de corruption, il tient le Pays et son nouveau président. Comment tournera le face-à-face de ce « système, » à la façade rénovée mais persistante, avec le mouvement Hirak, mobilisé pour un vrai changement ?

* 14 décembre – Lendemain de scrutin. Au Royaume Uni, les Conservateurs modèrent leur langage europhobe, tandis que les Travaillistes, grands perdants, se déchirent (les Lib-dem disparaissant, eux, du radar). Par contraste, le SNP écossais et les catholiques d’Irlande du Nord ont le vent en poupe, ce qui laisse présager leur évolution centrifuge. A. Merkel s’inquiète de la prochaine présence aux frontières de l’UE d’un champion de la dérégulation « sauvage ». Personne ne souligne que l’étape de la renégociation de quelques 600 accords sectoriels passés entre la Grande Bretagne et l’Europe sera bien plus complexe, longue et tendue que celle de l’accord de Brexit.

* 13 décembre – Verdir l’avenir. Après un jeudi noir, un vendredi vert : dans le cadre de sa perspective budgétaire 2021-2027, le Conseil européen adopte le Pacte vert anticipant d’importants moyens financiers (1000 milliards sur 20 ans ?). On attend beaucoup de la nouvelle Commission, sur ce plan. Que feront les lobbies ?

* 12  décembre – Jeudi noir. Mauvaises nouvelles en cascade : B Johnson donne au Royaume Uni une majorité parlementaire écrasante pour « faire le Brexit » fin-janvier (déconfiture pour Corbyn qui partira, résistance renforcée des nationalistes écossais, jubilation de D. Trump). L’Europe va souffrir. Participation piteuse (39,9 %) à la présidentielle algérienne, boudée par une majorité d’électeurs qui voudraient « sortir le sérail ». Le second tour et sa suite s’annoncent houleux, ce qui impactera la France. 71 militaires nigériens tués par les Jihadistes à Inates. Report de la convocation des présidents sahéliens à Pau, l’intervention dans la région tournant à « un Afghanistan en Afrique ».

* 11 décembre – Pax. Le prix Nobel de la Paix est remis au premier ministre éthiopien, Abi, pour son rôle dans l’apaisement du conflit avec l’Érythrée. Son homologue d’Asmara, « infréquentable », n’est pas associé à la distinction. Polémique autour du lauréat du Prix Nobel de littérature, Peter Handke. Les liens de l’auteur autrichien avec les nationalistes serbes génocidaires refont surface. Deux membres du comité Nobel démissionnent. A quoi exactement servent les prix Nobel ?

* 10 décembre – Journée internationale des droits de l’Homme. Publication de l’acte d’accusation de D. Trump (obstruction du Congrès, corruption …). Comparution de Aung San Suu Kyi à la Cour Pénale internationale (génocide des Rohingyas). Refus populaire, en Algérie, d’une présidentielle dans l’entre-soi des anciens notables. Très modestes résultats du sommet, en « format Normandie », sur l’Ukraine (quelques échanges de prisonniers). Quant au Proche et Moyen-Orient …

* 9 décembre – Tractations. Journée internationale de lutte contre la corruption. Coïncidence : la Russie dénoncée par le mouvement olympique pour falsification « étatique » de ses contrôles antidopage. Le « super-manipulateur », V. Poutine, rencontre aujourd’hui V. Zelenski, son homologue ukrainien, à Paris, sous les bons offices de Mme Merkel et M. Macron. Moscou veut faire lever les sanctions mais rester au Donbass. Kiev paraît trop fragile pour faire rétablir sa souveraineté. Néanmoins, mieux vaut faire parler les chefs que les canons et l’Europe peut mieux faire que le brutal chantage de D. Trump sur le pauvre président ukrainien.- Retour (discret) à Paris des onze jihadistes français et familles expulsés par la Turquie.

* 8 décembre – Conventions de Genève. A Zurich, échange de prisonniers, un contre un, entre Etats-Unis et Iran. Merci à la Suisse. C’est bien une preuve de pragmatisme entre deux Etats qui se considèrent manifestement en guerre.

* 7 décembre – Trahisons à la pelle. Le lâchage des Kurdes de Syrie ne suffisait pas. C’est au tour du gouvernement afghan, installé par la coalition occidentale. Lors de son premier déplacement en Afghanistan, D. Trump confirme la reprise des négociations avec le mouvement islamiste afghan.  » Les talibans veulent un accord, et nous les rencontrons ». Quelques semaines plus tôt, Washington avait pris la décision inverse. Le porte-parole taliban indique, pour sa part, qu’il est « beaucoup trop tôt » pour considérer toute reprise des négociations : normal, ceux-ci tiennent le pays, sauf la capitale. La curieuse décision, évocatrice de la fin du Sud-Vietnam, est intervenue la veille de la décision de convoquer, à Oslo, une conférence sur le sort de l’Afghanistan. Devant le président afghan, Ashraf Ghani, médusé, Trump a réitéré sa volonté d’accélérer son désengagement militaire. Le nombre de soldats américains descendra de 13 000 à 8 600, puis..  »on pourra aller beaucoup plus loin ». Un allié et protecteur fiable et conséquent, dans une guerre déjà perdue, il est vrai…

* 5 décembre – Blabla insipide. Le 70 ème anniversaire de l’OTAN s’achève, près de Londres, sur des conclusions insignifiantes. Mais, au moins, ses dirigeants ont-ils fait allusion à leurs contradictions. L’Alliance conserve-t-elle des valeurs démocratiques communes, une vision partagée des menaces, des règles décisionnelles adaptées ? En attendant, elle empile ses divergences et ses ennemis extérieurs : la Russie de Poutine, les jihadistes, le terrorisme en général … et même la Chine. Ursula van der Leyen s’inquiète de l’avant- projet finlandais de budget pluriannuel de l’UE. On verdira un peu quelques programmes existants, mais rien qui amorce une transition écologique.

* 4 décembre – Agir et laisser causer ! D Trump trouve que Macron est « méchant ». S’interroger sur l’objet de l’OTAN serait une grave marque « d’irrespect ». De plus, mal gérée comme elle l’est – du fait du désordre des gilets jaunes – l’économie française  e arriverait à piller fiscalement les autres pays (c’est la taxation des GAFAM) et devrait donc être sanctionnée. Sa pensée pâteuse ouvre à la France une voie pour mettre au débat les finalités de l’OTAN, traditionnellement limitées au seul leadership américain. Nos autres alliés ont été tout aussi contrariés par les propos trop cassants du Président sur la « mort cérébrale de l’OTAN ». Mais D. Trump est manifestement incapable, soit de satisfaire, soit d’étouffer la demande de clarté, qui est réelle. E. Macron gagnerait à moins claironner tout en poursuivant son approche dynamique de façon plus discrète : acquérir une main européenne renforcée sur les moyens de l’OTAN comme sur sa stratégie, mais surtout pas, surtout pas le dire !

* 3 décembre – Les Etats-Unis commettent une bourde en menaçant le statut économique privilégié de Hongkong, comme si l’exécutif local était seul et totalement responsable de la révolte dans la population de l’ancienne colonie britannique. Assez naïvement, le Congrès soutient les étudiants, non pas dans leur cause face à l’emprise de Pékin, mais dans leurs actions débridées. Celles-ci, en réponse à une répression sans âme ni sens politique, ont dérapé dans la violence. Ce n’est pas ce qu’il faudrait retenir du mouvement démocratique. Punir Hongkong en ménageant Pékin (Trump marque un respect suspect à l’égard de Xi Jinping), ce serait participer à un transfert de sa substance économique et financière vers Shanghai, Shenzhen (les métropoles « soumises ») et Singapour, la « complaisante ». Pratiquement ce serait faire le jeu stratégique du pouvoir pékinois en neutralisant Hongkong et donc ouvrir la voie à la « reconquête » militaire de Taïwan. Alors que s’ouvre un sommet de l’OTAN, sur fond de « sanctions économiques pour tous », l’Amérique se montre aussi obtuse envers la démocratie en Europe qu’en Asie.

* 2 décembre – Chat échaudé. Le ministère français de la défense renonce à livrer à la Libye les six vedettes rapides de 12 mètres promises : ne pas rééditer le scandale des armes lourdes françaises utilisées au Yémen contre les populations civiles . En Libye, on trouve des militaires et des équipements français (dont des missiles américains exclusivement réservés aux armées françaises), dans les deux camps de la guerre civile. Nos ingénieurs de l’armement ont bien du admettre qu’aux mains de milices trafiquantes, racistes et esclavagistes, ces navires n’allaient pas servir des buts acceptables. En 2011, la France de N. Sarkozy avait joué un rôle trouble dans le chaos libyen puis sahélien, favorisant la diffusion des armes et de la violence. L’externalisation hors d’Europe du (mauvais) « traitement » des exilés subsahariens atteint une limite.

* 1er décembre –  De profundis. Pour le dictateur Erdogan, c’est E. Macron qui serait « en état de mort cérébrale ». On connaissait des cas de « mort grave » mais celui-là tient bien la forme. De telles outrances sont dangereuses : elles empoisonnent les relations et n’aideront pas l’Alliance atlantique à « ressusciter », éventuellement en laissant la Turquie sur la marge. La Turquie, autant que Trump et Poutine, est d’ailleurs à la source du débat sur la défense européenne. Elles peuvent noircire l’image de la Turquie, en laissant dans l’ombre les millions d’honnêtes citoyens turcs, pacifiques et amicaux, et la compassion due aux  nombreuses victimes d’Erdogan.

Retrouvez les brèves de septembre-octobre-novembre 2019 : https://oursongeopolitique.blog/1-d-brèves-dhier-septembre-octobre-novembre-2019