Les migrations, une constante de l’épopée humaine, ont fait la richesse de nos sociétés.
Traditionnellement, l’asile, c’était un geste de protection accordé, au sein d’une église, contre la menace d’hommes en armes. Dans l’après-guerre, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (1948), la Convention de Genève (1951) et son protocole de New-York (1967), enfin, la création du Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR) ont achevé de consolider cette tradition dans le droit international humanitaire. Les procédures et outils actuels de l’asile remontent à la décennie 1980, l’époque des boat-people. Malgré l’utilisation assez cynique qu’en avaient les autorités vietnamiennes – trop heureuses de se débarrasser de sujets ‘’mal-pensants’’ – on avait vu alors un immense mouvement de solidarité et d’accueil en Occident. Il a bénéficié à plus de 100.000 d’entr’eux mais, depuis, les temps ont changé, hélas !
– ‘’On ne peut pas accueillir toute la misère du monde’’ aime-t-on dire. Cette affirmation est biaisée: notre devoir est d’en accueillir notre ‘’due proportion’’ (cf. le propos exact de Michel Rocard en 1998). ‘’Misère du monde’’ n’est pas, non plus, le terme le plus pertinent pour qualifier le besoin de protection. Celui-ci est une affaire de droit, de justice et d’humanité.
L’assimilation (à l’intérieur) et l’aide publique au développement (à l’extérieur) étaient les solutions du passé. Elles ne fonctionnent plus, dans un contexte de chômage chronique, de faillite budgétaire et de crispation sociale. ‘’Faudrait-il embarquer, en plus de la nôtre, l’inquiétude de tous ces inconnus ? Faudrait-il s’intéresser à leur vécu, aux spasmes de leurs régions d’origine ?’’ La suspicion montante envers les migrants serait aussi imputable à la mondialisation : ce sont l’idée perverse d’un ‘’choc des civilisations’’, les innombrables filières mafieuses gérant le passage des clandestins, la reconstitution de ghettos étrangers dans nos paysages urbains. Ce communautarisme rend possible de vivre à la marge, en contournant la culture et les lois du pays d’accueil (cf. le ‘’Londonistan’’, les tv câblées et les sites jihadistes). Pour beaucoup, il est anxiogène.
– Le droit d’asile – en termes juridiques : la protection internationale – est défini en droit international, nulle part ailleurs. Il est mentionné par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH) de 1948, dans son article 14. Il reçoit une définition dans la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés. Celle-ci a été ratifiée par quelque 140 Etats, sous sa forme complétée par le Protocole de New-York du 31 janvier 1967, qui en étend l’application à toutes les régions du monde.
Selon les définitions arrêtées, le mot ‘’réfugié’’ désigne toute personne cherchant une protection hors de ses frontières, dès lors qu’elle a été ‘’forcée de fuir son pays, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques »… »Cette personne se trouvant hors du pays de sa nationalité, ne peut pas, du fait de cette crainte, s’en remettre à la protection de ce pays » -(Convention de Genève article 1- a). On désigne là des situations où des personnes sont contraintes de quitter leur lieu de résidence parce qu’elles sont persécutées, parce qu’elles craignent pour leur vie ou celles de leur famille et ne sont pas protégées contre ces menaces. La quête de l’asile est, dans très peu de cas, le résultat d’un engagement politique et elle est, le plus souvent, la conséquence d’une situation insoutenable pour des personnes ordinaires.
Si elles restent à l’intérieur des frontières de leur pays, on parle de personnes déplacées. Il n’y a pas vraiment de statut pour elles, même si les Nations-Unies en ont établi une définition en 1981. Au total, on compte aujourd’hui 53 millions de déplacés et de réfugiés dans le monde. Le Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR) intervient auprès des deux catégories.
– Une demande d’asile en France vise à obtenir des autorités françaises la protection internationale et le statut corollaire de réfugié, définis par la convention de Genève. Aucun titre de voyage (passeport, visa, laisser passer) ne peut être exigé, même si une partie des demandeurs arrivent comme étudiants ou comme touristes et moins de 200/ an, avec un visa de demande d’asile délivré par les consulats. Le principe cardinal est celui du non-refoulement à nos frontières.
Un distinguo juridique s’impose entre migrations forcées, susceptibles de déclencher la protection internationale et migrations volontaires, qui ressortissent de la politique migratoire des Etats (notions de ‘’clandestin’’, de ‘’sans papier’’). Ces migrations économiques, pour des raisons familiales ou du fait de frustrations extrêmes (jeunes privés d’avenir) sont considérées en droit international comme ne produisant pas de réfugiés, même si, dans la réalité, les catégories sont poreuses, le choix des migrants n’est pas vraiment libre et que les contraintes pesant sur eux sont souvent inhumaines. N’oublions pas qu’ils n’hésitent pas à risquer leur vie en chemin et que beaucoup (5 à 10 % ?) la perdent. Les rescapés peinent à savoir dans quelle catégorie administrative nous allons finalement les classer. En tout cas, il serait très injuste de les voir en »envahisseurs » !
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¤ Approfondir : L’Europe, miroir aux alouettes : protéger les migrants ou les frontières (http://bertrandlavezzari.blog.lemonde.fr/2015/02/25/leurope-miroir-aux-alouettes-proteger-les-frontieres-ou-les-migrants/)