Pauvre Dilma, destituée dans un Brésil tristounet !

L'Ourson au Brésil

Le Brésil me désole. Non, je ne pense pas à l’organisation imparfaite des J.O. Après tout, 200 millions de Brésiliens n’ont pas boudé la fête, dans leur pays en pleine tourmente.

Passée la fête, ils ont du mouron à se faire, maintenant, les Brésiliens, devant la dérive qu’inflige à leur géant de pays une classe dirigeante sclérosée, âpre et incapable de redresser la barre. Avec la récession de 2008 s’était amorcé le  »grand délitement » de l’économie et du développement social. D’abord, le déficit extérieur encaissé par une économie de rente primaire (le soja, le pétrole, le bois, les minerais !), fortement affectée par la baisse des prix. Le retournement de la croissance était lié, notamment, à la baisse de la demande chinoise dont l’activité brésilienne dépendait exagérément. L’égoïsme, ensuite, a joué au sein d’une classe possédante, âpre à se refaire une santé financière aux dépens des politiques destinées aux pauvres et à la résorption graduelle des inégalités : panne de l’ascenseur social. Les comptes du pays avaient viré au rouge.

Malgré les circonstances, Dilma Roussef sera restée fidèle à elle-même : une présidente honnête et courageuse, mais, en même temps, bien peu charismatique et même maladroite. Sa vertigineuse chute de popularité, jusqu’au sein du Parti des Travailleurs, l’a poussée aux abois. Elle a été prise sur le fait d’avoir suscité – ou de seulement toléré – une présentation faussement flatteuse des comptes de l’Etat. Un grand classique universel de la vie politique-tromperie, me direz-vous. Oui, mais … Malgré certaines lois salutaires contre la corruption qu’elle avait promulguées, elle n’était pas de taille à endiguer la  »pêche par grands fonds » pratiquée par le mastodon pétrolier national, Petrobras, allié à un cartel de barons du BTP. Ces grands féodaux, avant tout soucieux de transformer en rente pérenne leurs dividendes fragilisés par la crise, et, tout autant, fidèles à leur mentalité de caïds, ont saupoudré les élus du Pays de leurs largesses empoisonnées. Ils ont agi tout comme, ailleurs en Amérique, on achèterait la dose de législation qui vous convient bien, en finançant la campagne du sénateur destiné à en assurer la promotion. Il s’agit presque toujours, au bout du compte, de se réserver des marchés captifs en tuant si possible la concurrence et en  »dérégulant » son secteur. Rien de neuf.

C’est-là que Luiz Inacio Lula, l’ancien président adulé, entré dans l’Histoire pour son combat sans précédent contre la pauvreté, pourrait – peut-être – avoir succombé à la tentation (on ne saurait dire encore). Pour corser le tout, un certain Eduardo Cunha, le  »pire ennemi » de Dilma et de Lula, intrigant à à la tête du Sénat, a lancé, en 2014, la longue et tortueuse procédure de destitution de la présidente,… avant que la justice ne le rattrape lui-même pour des délits de corruption avérée. Mais l »’impeachment » de Dilma a quand même poursuivi sa course folle jusqu’au bout, c’est à dire jusqu’au  »triomphe sans gloire », à la tête de l’Etat de son vice-président, le dénommé Michel Temer, un ancien allié politique supposément de gauche mais réincarné en chantre du néo-libéralisme à l’approche du pouvoir. Déjà condamné à l’inéligibilité au motif de financements électoraux frauduleux, il est, de plus, susceptible de tomber à tout moment sous le chef d’accusation de corruption. D’ailleurs, les deux tiers des sénateurs brésiliens ont ce genre de problèmes avec la justice, à l’heure de la campagne nationale  »lavo jato » (lavage express).
Je serais brésilien, je n’aurais pas le moral. Tout est à reconstruire…

– Une fois la scène publique brésilienne esquissée à grand trait, l’Ourson m’interrompt et se met à débiter les noms d’une flopée de personnalités politiques françaises, bien actuelles, qu’elles soient candidates ou non à des élections primaires :

*  »L’anémie de l’économie et le chômage, c’est A,B et C (je remplace par des alias) mais, rassure toi, ils y ont bien gagné sur un plan personnel ».

*  » La trahison des promesses électorales et le passage au néolibéralisme pour remplir ses poches, la liste est fort longue … » (et il me l’inflige, de bout en bout).

*  » Dans l’art du pousse-toi-de-là-que-je-prenne-ta-place, je citerais simplement … » (un vrai bottin mondain !).

*  » Les grands patrons qui ne font pas de politique car ils se contentent de l’arroser, la politique, alors là, tu vois, en comptant à la louche …  »(c’est à cet instant précis que je décide de ne citer aucun nom, pour ne pas être poursuivi au tribunal);

*  » Pour chacun d’eux, il y a plusieurs bénéficiaires que j’ai listé quelque part, plusieurs tomes, ça fait du monde ».

*  » Quant aux tripatouillages des comptes électoraux, diverses hautes trahisons et autres casseroles judiciaires, chez nous, il y aurait de quoi rythmer la samba des casseroles, des nuits entières, dans toutes les rues de l’Hexagone ! »

– Il exagère sans doute. Et moi qui voulais juste parler du Brésil… un pays chatoyant, chaleureux, magique … et bien  »comme chez nous ».

Pour approfondir et se consoler :
A propos de la cohésion paysanne au Brésil

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