Recycler : est-ce vraiment efficace ?

L’économie circulaire peut mener en bateau…

L’ourson a glané une chronique intéressante, quelque part dans le grand Nord-Ouest, vers le Lac du Poisson. C’est Philippe qui la lui a confiée. Si vous croyez en l’économie circulaire à l’échelle planétaire, et bien, vous avez tout faux !
* * * *

Alors que nous sommes de plus en plus nombreux à trier nos déchets et à les amener dans un centre de recyclage, savons-nous ce qu’ils deviennent par la suite? Est-ce vraiment un bon geste pour l’environnement?

Derrière cette question provocante se cache une réalité en demi teinte, loin de ce que l’on pourrait imaginer depuis le Yukon vaste et [pas pire] vierge.

– Prenons l’exemple des contenants alimentaires en plastique et en métal: après un tri sommaire et un compactage chez Raven Recycling, ces déchets sont acheminés en camion sur 2400 kms jusqu’à Vancouver. D’après Raven Recycling, le coût et l’impact environnemental de tous ces camions est moindre que celui de refaire tous ces emballages à partir de matières premières neuves.
Ok, sauf qu’une fois à Vancouver, ces déchets embarquent sur des porte-containers en direction… de la Chine!
A lui seul ce pays importe en effet 56% des déchets solides générés chaque année dans le monde, et la tendance s’accélère puisqu’entre 2006 et 2012 ce volume a augmenté de 66% (les derniers chiffres parlent de presque 9 millions de tonnes par an en 2012).
Vous me direz à juste titre que cela permet à ces immenses navires, extrêmement polluants, de ne pas repartir à vide après avoir livré en Amérique du Nord leur cargaison de produits « Made in China ».
Certes, cela fait sens. Sauf que cette chaîne logistique en place depuis des décennies repose sur deux conditions en passe de changer du tout au tout : un coût de la main d’œuvre chinoise faible, et des normes environnementales disons… « flexibles ». Au fur et à mesure de la croissance de la classe moyenne chinoise, les conditions de travail et les salaires s’améliorent régulièrement, ce qui rend de moins en moins rentable de recycler (et de plus en plus tentant de juste enfouir ces cargaisons de déchets).

– Par ailleurs, la Chine a officiellement annoncé en janvier 2018 ne plus accepter les déchets recyclables contenant plus de 0,5% d’impuretés, autrement dit un chiffre impossible à atteindre.

On voit donc 3 problèmes ici, sans parler de l’impasse qui se dessine :
* le bilan carbone du transport est plus mauvais que ce que l’on pouvait imaginer;
* le modèle économique de la filière du recyclage en Amérique du Nord est de moins en moins rentable;
* en bout de ligne, les déchets n’ayant pas été ensevelis sont recyclés dans des conditions de travail et des normes environnementales insatisfaisantes.

Et ce n’est pas fini!…
A chaque fois qu’une boite de conserve en métal ou qu’une canette en aluminium est fondue pour être reconditionnée puis remise en circulation, on perd mécaniquement 35% de sa matière. Autrement dit, au bout de trois cycles de recyclage, nous avons transformé en cendres 70% de leur matière! Pour les contenants en plastique ce n’est guerre mieux car la plupart sont « décyclés » en fibres synthétiques de vêtements, qui eux ne seront pas recyclables en fin de vie. Le fameux cercle vert qui se mord la queue, symbole universel de tout ce qui se recycle, en prend un vilain coup!

Et maintenant on fait quoi?
– Autant ce constat est accablant, autant la solution paraît limpide : ré-dui-sons nos déchets!
Ou encore mieux, appliquons la règle des « 6R », dans l’ordre :
* Refuser (avons-nous vraiment besoin de ce sac plastique? De cette paille?)
* Réduire (ces biscuits d’épicerie sont emballés individuellement? Changez de marque ou cuisinez-les!)
* Réutiliser (envie d’un café à emporter? Amenez votre tasse!)
* Réparer (des bottes d’hiver trouées? Sortez le Shoe-Goo!)
* Recycler (en triant hein! 🙂 )
* Composter ou Jeter (ok, là ça devient la règle des 6R-C-J, ça sonne moins bien)

On peut aussi acheter de la nourriture en vrac (Save on foods, Horizon, Farmer Roberts, Organic Matters, etc), acheter des aliments non-transformés (donc moins emballés), s’abonner l’été à un panier local (paniers d’Agriculture Soutenue par la Communauté du marché Fireweed)… les possibilités sont nombreuses!
(ndr : en France : nos AMAP)

Philippe Lavezzari

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