Un bandit assassin, à Khartoum

Au Soudan, le Conseil militaire de transition a décidé d’en finir avec le mouvement. Le numéro 2 du pouvoir Mohamed Hamdan Dagolo, dit Hemetti, serait l’âme du massacre.  Cette créature du régime d’Omar Al-Bachir permet poursuit un autre projet que la démocratie : pouvoir, crime et terreur.

Ce marchand-brigand et organisateur de caravanes s’est auto-promu milicien en chef des Rapid Support Forces (RSF), un habillage des janjawids traditionnels de sinistre réputation (massacres au Darfour, Sud-Kordofan et ailleurs, contrôle des camps de réfugiés…). Sans appartenir à l’Armée, il s’est propulsé à la tête des garde-frontières puis comme vice-président du Conseil militaire de transition (CMT) lors de la destitution d’Omar Al-Bachir, le 11 avril 2019. Il y règne en maître et s’impose en recours pour le rétablissement de l’ordre, à la tête de son propre groupe activiste, les « Patriotic Defence Forces », contrôlant 5 000 et 7 000 hommes armés dans Khartoum. Il parle aux diplomates étrangers et au princes saoudiens (dont l’héritier Ben Slaman) et se targue même d’opérer pour le compte de l’Union européenne, à la mise en œuvre des politiques migratoires de Bruxelles au Soudan, un pays de départ mais aussi de transit. Fort de ce rôle, il campe en promoteur – ambigu – de la lutte contre le trafic des êtres humains et s’en est fait une rente.

Belligérant dans la guerre du Yémen aux côtés de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis, ses mentors, il est aussi devenu magnat d’une compagnie d’exploitation de mines d’or, à Jabal Amir, au nord du Darfour. Dans la crise actuelle du pouvoir, Hemetti représenterait, en fait, une sorte de fusible entre l’armée régulière, les forces paramilitaires et les mouvances islamistes opérant dans l’État. Alors que les hauts gradés se savent, depuis la guerre au Darfour (2003), sur la liste des responsables de crimes de guerre par la CPI, c’est à lui qu’on pourrait faire porter le chapeau s’il échouait.

– Hemetti, ne peut tolérer aucune barricade (‘matari’), même symbolique, dans la capitale. Il lui faut mater les insurgés de tous bords. L’accord tacite des Forces de la liberté et du changement (regroupant des partis historiques et l’Association des professionnels soudanais) au démontage de certaines barricades est perçu comme un premier pas dans sa conquête de Khartoum.

– Le « Tiananmen » a eu lieu le lundi 3 juin. Le nombre des morts et blessés, parfois jetés dans le Nil, s’annonce considérable. Le modus operandi porte la marque des RSF d’Hemetti : des hommes en uniforme des RSF ont encerclé dans la nuit la place du sit-in pacifique, face au QG de l’armée. Tirant à balles réelles, ils ont, selon des témoins, fauché les jeunes par dizaines qui appelaient pacifiquement à la passation du pouvoir aux mains des civils. Une réminiscence de Pékin-1989. Son porte-parole, le général Chamseddin Kabachi, a justifié le massacre par « la présence d’éléments nuisibles et criminels qu’il fallait neutraliser dans le périmètre du sit-in ». Hemetti est perçu comme l’artisan de ce massacre, même s’ il a prétendu, à la télévision, avoir capturé les responsables de la tuerie « déguisés » en RSF. Il n’y aura pas d’enquête, évidemment. Ses miliciens patrouillent désormais la capitale en cherchant à imposer un régime de terreur. Mais rien n’est encore scellé, car la population ne se sent pas vaincue. Ses leaders appellent à « une action de désobéissance civile totale dans tout le pays », à ériger des barricades, à entamer une grève générale jusqu’à la chute du Conseil militaire de transition… (ou de de trahison). On en est là et ce n’est pas rassurant.

Résumé depuis une étude d’Orient 21 à qui vont les remerciements de l’Ours

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