En règle générale, les vérités sont plutôt bonnes à dire. Encore, en fonction de sa propre situation de partie, de juge ou d’observateur, celui qui les exprime peut avir à y mettre les formes ou simplement à s’en distancier un peu. Ce n’est pas le choix qu’a pris le président français vis-à-vis de la classe politique libanaise. Celle-ci se voit dénoncée comme coupable d’une ’’trahison collective’’ de ses engagements envers les Libanais et envers E. Macron. Elle fait ‘’honte’’ à ce dernier. Un ultimatum de quatre à six semaines lui est imposé pour former un gouvernement de techniciens… et disparaitre.
Car c’est bien de son effacement général qu’il s’agit, avec un accent particulier mis sur le Hezbollah, dont il est exigé qu’il renonce à son emprise militaire sur l’Etat et à son affiliation iranienne. Rien que ça, même si, sur le fond, on se doit d’approuver l’intention ! Cet effet théâtral cache-t-il l’échec de l’implication extrême et très personnelle du premier des Français, après deux visites spectaculaires à Beyrouth destinées à mettre chacun devant ses responsabilités ? En tout cas, sa tentative de la dernière chance pour empêcher l’effondrement total du Pays du Cèdre étonne par sa brutalité et par le peu de cas fait de la souveraineté d’un Etat, certes empêtré, mais en principe toujours souverain. On chercherait en vain dans l’Histoire un précédent de classe politique clanique et corrompue qui se serait suicidée pour satisfaire à l’intérêt général et à l’attente d’un observateur extérieur. Et comment se comporteraient les techniciens appelés à s’y substituer, sinon en nouvelle caste dirigeante, elle aussi accrochée à ses privilèges ? Car c’est bien les rentres qui font vivre et le népotisme qui assure la stabilité des élus, anciens ou nouveaux.
De plus, l’engagement militaire du Hezbollah contre Israël (et contre ses propres adversaires politiques) légitime durablement celui-ci aux yeux d’une majorité des Chiites du Liban. Faire table rase de ces réalités profondément ancrées, suggère qu’on ait recours à la violence et l’imprédictibilité d’une révolution populaire, à laquelle E. Macron n‘adhère sans doute pas et qui dégénèrerait forcément en guerre civile, dans le grand conflit régional actuel. De façon étrange, le président français ne paraît pas avoir mesuré les énormes dangers jalonnant sa croisade libanaise. Il se contente d’essayer de se protéger sous le bouclier des Nations-Unies, paré duquel il reviendra à Beyrouth fin-octobre.
A l’opposé de l’affaire libanaise, il part aujourd’hui en terre balte après avoir hésité un mois durant à demander – poliment – le départ du dictateur Loukachenko. Il ne pouvait pas dire moins pour recueillir quelques applaudissements à Riga et à Vilnius pour un bien plus modeste théâtre.