Courageux, voire téméraire, le Pape François a couru les risques élevés d’un déplacement en Irak. Il l’a fait, envers et contre tout, au nom d’un ‘’devoir de présence’’. La pandémie galopante, les attaques qui se sont succédé ces dernières semaines, les multiples menaces contre les communautés chrétiennes, rien de tout cela ne l’a fait changer d’avis. Il était déterminé à témoigner en personne de son soutien aux chrétiens et à tous les Irakiens victimes de la violence, du terrorisme et du fanatisme.
Depuis 1990, et l’invasion du Koweït par les armées de Saddam Hussein, jusqu’à la prise de Mossoul en juin 2014, l’Irak a constitué l’épicentre d’un séisme humain, où se mêlent guerre civile, islamisme et terrorisme. Le pays a subi 1400 attentats l’an passé. Les répercussions de toute cette violence ont enflammé le Moyen-Orient et ébranlé le monde.
En fait, François ne cache pas être venu, d’abord, pour réclamer la protection des communautés chrétiennes, chaldéennes, assyriennes ou syriaques, martyrisées, comme le sont aussi les Yézidites, sous le joug abominable de Daech. Leur nombre a périclité, passant, en vingt ans, de 1,5 million de membres à moins de 400 000, au gré des massacres et des exodes. Ce noble but du Souverain Pontife relève, de toute évidence, de son sacerdoce. Il a associé aussi à sa sollicitude la composante chiite majoritaire du Pays, essentiellement celles des institutions de pouvoir, qui sont plutôt oppressives. Il est probable que les sunnites, écartés de la vie publique depuis la chute de Saddam, et, surtout, la jeunesse irakienne, qui depuis deux ans s’insurge contre l’inanité des vieux clans théologiques dictatoriaux, se sont sentis ignorés voire écartés de sa bienveillance. Le Vatican est un Etat et, en tant que tel, il n’est pas prémuni contre les syndromes du réalisme politique et de la courtoisie protocolaire.
‘’Que se taisent les armes !’’, a lancé le pape François, dans un appel poignant à la paix, en présence du grand ayatollah d’Ali Sistani, l’autorité religieuse suprême pour de nombreux chiites d’Irak et du monde. ‘’Assez de violences, d’extrémismes, d’intolérances’’, a-il-ajouté. ‘’Assez aussi, de ‘’corruption’’. Ce sont des mots qui rappellent ceux de E. Macron au Liban… dont on a vu le peu d’effet. François a sans doute des ressources d’empathie supérieures à beaucoup d’autres hommes d’Etat et il a aussi le mérite de s’adresser à la branche minoritaire de l’Islam, celle que les vendeurs d’armes occidentaux rayeraient bien de la carte avec leurs bombes, pour quelques €uros de profit. Mais, même avec les yeux de la foi, les nobles formules ne génèrent pas de miracle, dans ce Moyen-Orient plongé dans des psychoses barbares. C’est peut-être nous, Européens et Américains, qui devrions nous inspirer un peu des propos de François.