* 16 septembre – L’Union fera-t-elle la force ?

Un point sur l’état de l’Union – sur le mode américain – en plein septembre. Pourquoi pas ? Il s’est passé beaucoup de choses dans le monde qui déstabilisent la civilisation humaine et concernent donc aussi l’Union européenne. A moins, bien sûr qu’on la considère comme une grosse autruche, la tête douillettement enfouie dans le sable… et qui préfère ignorer le coup de matraque qui va l’assommer d’on ne sait où. Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, n’est pas au nombre de ces inconscients autocentrés. Elle sait bien que l’avenir des Européens et leur capacité à faire face au monde passe plus encore par Bruxelles (et aussi par les exécutifs locaux) que par le truchement des Etats-membres, dépourvus de moyens, obsédés par les échéances électorales et portés à se chamailler sur tout. Les 27 ressemblent bien à des tribus gauloises face à l’offensive de Rome (le monde extérieur). La Commission a plus de vision, bien qu’elle soit ligotée par l’impératif du consensus entre les capitales et par un défaut du pouvoir exécutif (le Parlement et le Conseil ne constituant pas un duo d’autorité).

Bref, Ursula a donc prononcé, le 15 septembre, son discours sur l’état de l’Union, dont elle s’engage à faire un rendez-vous annuel. Fort bien. Espérons que les autres institutions européennes mais aussi les capitales sauront lui embrayer le pas par des propositions et des volontariats.

Concernant le Covid-19 Mme von der Leyen s’est réjouie du succès de la vaccination au sein de l’UE et a annoncé l’attribution de deux cents millions de doses de vaccins supplémentaires au programme Covax d’ici mi-2022. Ce don (d’Astra Zeneca, dont on ne veut plus chez nous ?) s’ajoutera aux 250 millions de doses déjà annoncées. ‘’C’est un investissement solidaire et c’est aussi un investissement dans la santé mondiale’’, a-t-elle souligné. L’assistance à l’acquisition équitable des vaccins et à la progression vers l’immunité collective est un domaine que la Commission a pris directement en main, sans trop s’attarder sur ses compétences de par les traités. Elle est parvenue à suppléer à l’impéritie de certains de ses Etats-membres et à coordonner la levée des restrictions à la circulation des personnes. Gros impact, donc, sur la vie des citoyens. C’est, par ailleurs, un volet significatif du ‘’pouvoir doux’’ (soft power) en politique extérieure de se projeter en protecteur (sanitaire) des pays du Sud. Dans la perspective des cycles pandémiques qui s’annoncent, le Vieux Continent peut regagner, par cette voie, une part de l’influence perdue au début de la crise du virus Covid, du fait de puissances plus dynamiques et plus agressives.

Un sommet sur la défense européenne au premier semestre de 2022 ? Voilà qui paraît taillé sur mesure pour le président français, qui exercera la présidence tournante. Et on comprend la Commission de lui avoir prudemment délégué un sujet aussi explosif, qui va générer une énorme polémique et le risque d’une paralysie, comme la Communauté européenne de défense l’a fait à la fin des années 1950. Les forces d’inertie sont énormes dans les opinions publiques. Les loyautés des dirigeants vont souvent vers l’Atlantique Nord plutôt qu’à Bruxelles. La radinerie est la règle concernant les dépenses militaires. L’état du monde et ses dangers, au lieu de susciter un sursaut, deviennent un objet de déni : l’autruche enfonce sa tête plus profond. ‘’Ce qui nous a retenus jusqu’à présent n’est pas seulement un manque de capacités, c’est le manque de volonté politique », dixit Ursula. Pratiquement, il faudrait réaliser une Europe fédérale pour gérer la défense à 27. Mission impossible.

A l’extérieur, la débâcle occidentale en Afghanistan est aussi celle de l’Europe, même si les Etats Unis en assument la responsabilité principale. Pourquoi donc a-t-on laissé l’OTAN être détournée par des aventures orientales mais pas au Sahel et à quoi sert désormais cette alliance ? Va-t-on nous embarquer, par la suite, dans un duel stratégique avec la Chine ? La demande a été faite et Washington construit un dispositif d’endiguement militaire dans le Pacifique, au sein d’une alliance privilégiée avec le Royaume Uni et l’Australie (laquelle renonce du coup aux 12 sous-marins commandés à la France au profit de bâtiments américains à propulsion nucléaire). Faut-il suivre, faut-il renoncer à une préférence pour l’équipement de défense européen ou, au contraire, imposer une discipline ? La réflexion sur l’autonomie des Européens ne sera pas un fleuve tranquille… si toutefois elle parvient à terme. ‘’Le moment est venu pour l’Europe de passer à la vitesse supérieure pour se défendre contre les cyberattaques, agir là où l’Otan et l’ONU ne sont pas présents et gérer les crises à temps », a expliqué Ursula. Constituer un roc de stabilité et de droit là où l‘anarchie prévaut : l’idée séduit. Quant aux modalités, la mention d’une force européenne de réaction rapide de 5 000 militaires tient du gadget. Elle renvoie aux multiples tentatives – sur une plus grande échelle – qui ont émaillé les débats sur la défense dans les années 1990. Sur le papier et même en effectifs réels, ces forces ont existé, mais on voit les Français très peu épaulés par d’autres dans leurs opérations au Sahel. Le problème tient à la totale (et archaïque) souveraineté des Etats-membres, libres de ne PAS engager leur contingents au combat. Josep Borrell synthétise la chose ainsi : ‘’Vous pouvez disposer des forces les plus avancées du monde, mais si vous n’êtes jamais prêts à les utiliser, à quoi servent-elles ?’’ Ce n’est pas gagné d’avance. Bref, on souhaite à Emmanuel Macron non pas du courage (il en a ) mais de l’écoute et une sacrée force de persuasion.

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