Très mauvaise nouvelle pour l’Industrie : les exportations d’armement français ont diminué de 41 % en 2020 ! Serait-ce une menace de paix planant sur le monde ou seulement le COVID qui aura ralenti les efforts de nos marchands d’armes pour préparer »la prochaine’’ ? Penchez plutôt pour la seconde hypothèse : cette baisse des contrats tiendrait principalement à la pandémie. Mais les livraisons avaient déjà diminué de près de 8,6 % en 2019. Alors, mauvaise conjoncture passagère, cette dégringolade en 2020, ou accélération tendancielle ? Selon le Gouvernement, les centaines de milliers de travailleurs œuvrant pour l’export n’auraient pas trop de souci à se faire. Ça va redémarrer, nous dit-on !
L’an dernier, les prises de commande étrangères s’étaient élevées à 4,9 milliards d’€uros, contre 8,3 milliards d’€uros en 2019 : trou d’air. Notre meilleur client – incidemment en guerre contre son voisin yéménite – reste l’Arabie saoudite, pour un montant de 704 millions d’euros. Viennent ensuite les Etats-Unis, pour lesquels les firmes françaises sous-traitent des composants (433,6 millions d’euros), puis le Maroc (425,9 millions d’euros)… Tiens donc ! Les produits français iraient-ils se balader au Sahara occidental ? Israël, dont les missiles intègrent des modules made in France (on en a récupéré à Gaza), ne figure pas en position éminente. Il est vrai que ses circuits d’approvisionnement peut aussi bien passer par les Etats Unis.
L’avenir semble assuré. L’Egypte, une démocratie irréprochable (?), vient de signer pour 30 Rafale supplémentaires, après la Grèce, qui en a requis 18 d’urgence, pour faire face à la Turquie (dont 12 ‘’prélevés’’ sur l’Armée de l’Air française, la pauvre !) . La Croatie qui s’en est fait livrer douze d’occasion. Les affaires reprennent. Le plus curieux est que, dans son rapport sur l’année 2020, le ministère de la Défense présente l’Europe comme la principale destination export de son industrie, le ministère de l’Industrie bis. Elle absorberait 25 % des commandes. Eureka ! On serait donc bien parti pour faire progresser l’Europe de l’Armement ? En fait, oui et non, selon qu’on inclut dans le lot ou pas la Turquie d’Erdogan. Que livre-t-on à cette puissance parmi les plus belliqueuses de la planète ? Erdogan se voit-il seulement en dirigeant d’une puissance européenne ?
N’allez pas consulter le rapport, il ne vous révèlera rien de plus que les généralités qu’on peut lire dans les journaux. Le Parlement français, malgré la mission d’information qu’il a arrachée au gouvernement il y a deux ans, n’en saura guère plus, non plus. Le contraste reste frappant avec le droit à en connaître, qui constitue la règle dans les institutions législatives des démocraties occidentales. L’omerta française sur les exportations d’armement est unique et elle a la peau dure. L’institut de sondage Harris Interactive a récemment relevé que 80 % des Français se déclarent mal informés sur le sujet et qu’ils éprouvent du mal à comprendre les enjeux et les conséquences des ventes d’armes de leur pays. Pour 75 %, une transparence s’imposerait. Encore un petit effort pour sortir du brouillard et voir le monde tel qu’il est !