Les guerres d’agression font des petits. L’Azerbaïdjan et l’Arménie recommencent leur confrontation armée depuis trois jours. La situation autour du Haut-Karabakh, en grande partie récupéré par Bakou, est de plus en plus tendue alors que le premier des deux républiques ex-soviétiques a lancé une offensive d’artillerie sur son voisin. Une dictature brutale s’en prend, là encore, à une démocratie. Comme toujours, les deux pays s’accusent mutuellement d’avoir lancé les hostilités. En 2020, conformément à un accord de cessez-le-feu, Moscou avait déployé des soldats de maintien de la paix au Nagorny Karabakh, l’enclave de culture arménienne revendiquée par l’Azerbaïdjan comme un de ses territoires éternels. Le conflit ayant fait près de 7000 mort et son armement n’étant pas au niveau de celui adverse, Erevan s’était plus ou moins résignée à cette humiliation. Le cessez-le-feu de 2020 n’ayant pas débouché sur un accord de paix, les parties restaient dans une situation de conflit larvé… qui s’est donc rallumé.
En haut de la pyramide belliciste, l’exemple de la ‘’loi des loups’’ est donné par la Russie de Vladimir Poutine. Aux franges du Caucase et de l’Asie centrale, l’impunité tend à s’imposer comme ailleurs, en termes d’invasion, d’annexion de territoires et de frappes militaires sur des populations civiles. L’Azerbaïdjan en 2020 , comme la Russie en Ukraine, s’est d’abord attaqué aux territoires voisins qui lui étaient les plus liés par l’Histoire, la contiguïté géographique ou la culture. Aujourd’hui, Bakou, à l’image de Moscou, est passé à l’expansionnisme dur, avec malheureusement dans son cas, l’appui du grand allié turc. L’OTAN voit dès lors l’un de ses principaux membres et fournisseur d’armes en Ukraine se compromettre sur ce théâtre traditionnel du grand-turquisme. Ankara agit alors en adversaire de l’Europe et des démocraties.
L’attrition militaire et la désorganisation que connaît le protecteur traditionnel russe de l’Arménie (en vertu d’une alliance de défense) ont ouvert une fenêtre d’opportunité pour régler des comptes avec Erevan. Moscou appelle au calme mais ne bouge pas ou n’a d’autre choix que de laisser faire. Pour le dictateur azéri, une nouvelle victoire militaire constituerait le plus beau cadeau il puisse offrir à son peuple, pour se maintenir éternellement à sa tête. Il n’est pas le seul à faire ce calcul.
La présumée ‘’communauté internationale’’ appelle à la « retenue » et à un ‘’règlement pacifique du différend’’, formule consacrée, la plus plate et la plus impuissante qui soit, à laquelle on a recours quand on ne va rien faire. La France préside néanmoins actuellement le Conseil de Sécurité. Lors d’entretiens avec plusieurs dirigeants mondiaux, dont Vladimir Poutine et Emmanuel Macron, Nikol Pachinian, le premier ministre arménien, a appelé la communauté internationale à ‘’réagir’’. Cela n’a galvanisé personne. Emmanuel Macron se serait adressé au président Aliev d’Azerbaïdjan, le priant urgemment de mettre fin aux hostilités, et de revenir au respect du cessez-le-feu. Cela ne va pas effrayer ni convaincre ce dernier, qui sait bien que tout le monde a la tête ailleurs, grâce à la guerre d’Ukraine. Ce nouvel épisode de conflit post-soviétique est donc appelé à se développer.