* 12 juillet – Bojo les dégâts !

Doit-on railler celui qui a si constamment  »déraillé » ? La géopolitique n’est pas matière à défoulement. Mais, quand même, l’envie ne manque pas de ricaner un peu sur la piteuse (prochaine) fin du Berlusconi britannique. Ses incessants mensonges, son irresponsabilité congénitale, ses désastreux choix politiques ont (presque) eu raison de lui. A deux importantes nuances près :

-Boris Johnson n’a pas démissionné de son parti. Il a été forcé par les députés de son groupe à renoncer à la présidence Tory. Sa nature profonde veut qu’il s’accroche – pour un temps – à la direction du Cabinet, un exécutif en lambeaux que les démissions en rafales privent de légitimité. La fonction de Premier ministre procédant de la précédente (patron des Tories), le gouvernement conservateur s’en trouve boiteux, en l’attente de la nomination d’un nouveau leader. En période de crises multiples, les destinées du Royaume Uni sont abandonnées, pour quelque temps, à un politicien  »électron libre » que personne n’accompagne ni ne contrôle. Il va s’appliquer à faire n’importe quoi pour se maintenir sur le job et faire parler de lui le plus longtemps possible. C’est inquiétant.

-La seconde nuance tient à l’humeur durablement anti-européenne du Parti Conservateur. Tant que cette formation restera majoritaire dans l’opinion, sa doxa demeurera de pousser toujours plus loin sa conception du Brexit. De nombreuses études montrent que la Grande Bretagne est globalement perdante, mais cela n’aura aucune incidence sur un choix avant tout idéologique et identitaire. S’ils revenaient au pouvoir, même les Travaillistes ne changeraient sans doute pas cette course vers le grand large, entamée depuis dix-huit mois.

Il reste que  »Bojo » a introduit la confusion des esprits et la corruption des valeurs morales dans le jeu politique britannique. Faire cesser toute la débauche de ces derniers mois constitue une urgence qui fait consensus. Comme l’Italie en son temps s’était réveillée effarée par les dérives de Sylvio Berlusconi, le Royaume commence à se vacciner lui-même des méthodes populistes inhérentes au phénomène Boris. Son style avait séduit les partisans d’une rupture avec le conformisme politique classique, au profit d’un comportement émotionnel et volontiers transgressif. Les mêmes commencent à s’en lasser. Un regain de rigueur et de cohérence est à espérer de l’après-Boris. Attendons la tenue d’élections législatives anticipées. Les relations avec l’Europe pourraient en bénéficier, au moins sur la forme.

Boris Johnson laissera un lourd passif derrière lui. Loin des promesses mirobolantes qu’il avait brandies à la veille du Brexit, l’état de la société britannique est marqué par des inégalités extrêmes, une forte inflation et des pénuries de main d’œuvre. Ce triste bilan demeurera une bombe à retardement. Hormis en Ukraine, où l’aide militaire britannique a été fort appréciée, l’image de sérieux du Royaume Uni s’est fortement dégradée à l’international. Une  »épine » douloureuse entre toutes reste plantée dans la relation post-Brexit avec l’Europe : le projet de loi relative à l’Irlande du Nord élaboré à Westminster, qui vise à renier les engagements pris à l’égard de Bruxelles. Le nationalisme anglais (par contraste avec les autres composantes du Royaume) ne supporte pas le fait que la frontière douanière UK – UE passe en mer d’Irlande, entre l’Angleterre et son appendice nord-irlandais. Londres préfère à cela le risque de ranimer les ferments de guerre civile en Ulster, dès lors que les contrôles seront transférés sur la démarcation terrestre entre les deux Irlande.

Il reste donc un fort potentiel de dégâts sous la main populiste de  »Bojo ». Bojo les dégâts !

* 19 octobre – Temps brumeux sur la Manche

Tristounet, l’état des relations euro-britanniques, et les émotions aidant, celui des liens franco-britanniques. Le divorce a été sec, brutal et acté au couperet. L’heure est aux contentieux et aux suspicions. Tout ça aurait dû être évité. Aujourd’hui, le voisin d’outre-Manche est déserté par des corps de métiers immigrés ou expatriés, certains de ses étales s’en trouvent vides et les transports désorganisés, l’essence se fait rare, les communautés étrangères hésitent à rester. Tout ça pour ne rien devoir au grand marché européen et, surtout aux institutions communautaires qui en sont des rouages essentiels. La sacro-sainte souveraineté nationale a été mise au service de la séparation et elle trouve des échos tout aussi incisifs sur le continent.

Les droits de pêche dans les eaux britanniques en sont un déplorable exemple. Le Royaume Uni et, singulièrement, les îles anglo-normandes sont en droit de négocier ‘’souverainement’’, selon leur intérêt. Dans ma Bretagne, les armements de chalutiers sont rouge d’indignation devant les procédures d’octroi  des licences. Un bon nombre sont incapables de prouver leur présence ancienne et continue dans ces eaux poissonneuses et donc de remplir les critères. Le Homard et les langoustines se fond rares chez mon poissonnier. On aurait pu travailler sur des quotas d’ensemble plutôt que bâtiment par bâtiment. De là à organiser le blocus du port de Saint Hélier et de menacer la population de Jersey de lui couper l’électricité ! Et certains élus locaux qui s’y rallient. La prise d’otages est criminelle et inadmissible : qui sont les imbéciles qui veulent faire revivre la Guerre de Cent ans ?

Une autre blessure a été ouverte par le projet (américain) ‘’d’alliance’’  AUKUS en région indo-pacifique. Pas tant du fait d’un suivisme inconditionnel manifesté à l’égard de Washington (Paris aurait souhaité pouvoir en faire autant) mais de l’omerta maintenue pendant 18 mois à l’encontre d’une marine française étroitement associée à la Royal sur le plan opérationnel. On peut bouder. On pourrait aussi bien requérir de Londres un geste généreux et réaliste pour raccrocher le bateau français et dans son sillage, l’Europe, dans un grand plan d’ensemble, s’agissant d’une région ‘’chaude’’ du globe où la France administre des territoires.

Parlant de l’Europe, elle a eu quelque mérite à se préoccuper de la paix entre les deux Irlande. Dans ce volet sensible du Brexit, la négociation du protocole nord-irlandais s’est faite de bloc à bloc. Belfast a fait corps avec Londres et Dublin s’est fondu parmi les 27. Il faut reconnaître que la solution trouvée et acceptée par les deux parties est franchement bizarre et peu pratique : une frontière douanière en mer passant au milieu d’un Etat souverain. Cet arrangement à  »souveraineté écornée » crée une paperasserie et des délais difficilement soutenables. Bruxelles a d’ailleurs proposé d’alléger les procédures de moitié. Cela aurait dû être fait dès 2020. Mais, la blessure est aussi politique, nichée dans la fierté britannique.  De ce fait, la volonté du gouvernement de Boris Johnson de délier la Cour de Justice européenne de la gestion des contentieux sur le Marché unique relance les crispations et les suspicions (le Royaume Uni exerce-t-il une vengeance au-delà des désaccords de fond ?). Aux yeux du reste du monde, cette méfiance risque simplement de décrédibiliser la grande Europe (au-delà de l’UE). Elle existe et constitue notre voisinage le plus stratégique. Raison de plus pour mettre quelques bémols à nos susceptibilités, un peu archaïques et assurément stériles.

En une autre époque, j’ai pu constater la forte affinité entre les stratèges britanniques et français quant à leur vision du monde. De façon générale, les élites des deux pays se fréquentent avec plaisir. Quelle tristesse que les brûlots  des media des deux rives imposent un ton sarcastique et désobligeant à cette relation de toujours. Depuis la chute de l’Empire romain jusqu’à la Guerre de cent ans, on s’est certes pas mal ‘frités’’ comme entre toutes les tribus occupant un terroir, mais les Celtes des deux rives appartenaient aux mêmes familles et partageaient leur espace, leur langue et leur culture naturellement. Il faudrait s’inspirer de ce vieux cousinage.

* 23 juillet – Lubies circulaires

Revoilà l’ineffable Boris Johnson ! A l’automne 2019, après avoir fait lanterner Bruxelles deux ans et demi, il avait validé de sa main le ‘’protocole irlandais », une clause centrale et hyper-sensible du projet d’accord post-Brexit définissant l’avenir des relations UE – Royaume Uni. Londres s’était officiellement félicitée de cet accomplissement. Le but était d’éviter le retour d’une frontière terrestre de l’Ulster avec la République d’Irlande, comportant le risque d’une rupture du Traité du Vendredi saint de 1998, garant d’une paix retrouvée mais qui restait fragile. Entré en vigueur début 2021, ce protocole régit désormais le statut dual de l’Irlande du Nord : politiquement, la province de l’Ulster reste une partie constituante inaliénable du Royaume-Uni, dont la souveraineté n’est pas limitée. En matière de commerce extérieur, elle consent cependant à s’aligner sur les normes du marché intérieur de l’UE. C’était la seule façon de maintenir ouverte la frontière entre les deux Irlande, tout en évitant une entrée massive, par voie de de fraude et contrebande, de biens interdits ou tout au moins d’origine non-contrôlée dans l’aire de consommation des  »27 ». Ingénieux, ce compromis avait permis de surmonter le plus haut obstacle rencontré dans le cours la négociation et de maintenir la paix civile irlandaise.


Mais, depuis le début de cette année, Le gouvernement de Sa Majesté rechigne à mettre en œuvre ses engagements et à procéder aux contrôles douaniers prévus. Sur le départ en vacances, comme son Parlement qui entre en récession, Boris Johnson, signifie tout de go à Bruxelles, vouloir renégocier – dans son ensemble – le protocole nord-irlandais : énorme frappe de boulet de canon dans un jeu de quilles bien rangé. Sans entrer dans la polémique, Maros Sefcovic, vice-président de la Commission européenne, a sobrement répliqué :  »Nous n’accepterons pas une renégociation du protocole ». On doit s’attendre à une guerre d’usure, tant que Johnson restera en mesure de piloter en mode girouette la diplomatie de son pays. Le dispositif de contrôle des marchandises dans les ports de Mer d’Irlande ne constitue pourtant aucunement une frontière. Il n’a pas d’incidence sur la libre-circulation des personnes. Mais, Westminster veut considérer que si. La formule qui permet de sauver le commerce dans les règles établirait, selon le Premier ministre  »une frontière », à l’intérieur du Royaume. A partir de là, la souveraineté britannique serait entravée de façon (acceptée mais) inacceptable. Quant aux Irlandais, qu’ils s’affrontent donc entre eux, les Conservateurs de Londres n’en ont cure !


Où est passé le respect du droit et de la parole donnée ? Où se situe aussi l’intérêt de l’Ulster, celui du Royaume Uni et celui des Britanniques amenés à s’ajuster sans cesse à ce Brexit en grands zigzags ? L’essence de la souveraineté veut que l’application souveraine et librement consentie du droit et des engagements contractés s’intègre dans la souveraineté de l’Etat contractant. Un peu de réflexion s’imposerait sur la conception johnsonienne, pleine de cynisme, du  »grand large ». Chacun peut voir qu’elle dessert l’image du Royaume Uni dans le monde. Dommage !

* 9 avril – Brexit désespérant

Souvenons-nous comme Michel Barnier mettait en garde contre les conséquences du Brexit sur la paix civile fragile de l’Irlande du Nord. Rétablir une frontière douanière signifiait, selon le positionnement de celle-ci, que l’Irlande insulaire se retrouverait coupée en deux ou détachée de l’Angleterre et, dans les deux cas, que la violence y cheminerait à nouveau. Facile prédiction que Westminster ne voulait pas entendre, tout à son obsession d’une Grande Bretagne cinglant vers le grand large. On y est : non pas vraiment au grand large, mais à la déconstruction d’une paix laborieusement rétablie en 1998, par l’accord dit du Vendredi Saint. La sanction de la myope indifférence de Boris Johnson a été préfigurée par un spectacle d’étales alimentaires vides, à Belfast, les distributeurs s’étant perdus dans les arcanes des nouveaux circuits douaniers permettant l’importation depuis l’Angleterre.

Ensuite, les formations politiques locales ont mis en ébullition les populations pauvres, regroupées de part et d’autre des ‘’murs de la paix’’, des grilles que l’on ferme chaque soir à 18h00 pour séparer hermétiquement les communautés protestante et catholique. La première est d’autant plus nerveuse que sa majorité au gouvernement de Belfast ne tient qu’à une voix d’avance. Les premières briques, lancées par des jeunes contre la police, sont venues de là, à l’incitation des groupes unionistes (protestants) paramilitaires. Ces loyalistes, partenaires par essence du gouvernement de Westminster, sont en effet profondément divisés. La fracture passe entre ceux qui en veulent à Johnson de les avoir trahis et sacrifiés – après qu’ils l’ont aidé à faire voter le Brexit –  ils ressentent, de ce fait, moins d’hostilité envers la République d’Eire au Sud – et, à l’autre bout de l’échiquier politique, ceux qui s’acharnent à relancer l’insurrection, pour éviter un désaveu par les urnes. De Londonderry à Belfast, ceux-là ont mis le feu, chaque nuit, depuis une dizaine de jours et transformé en fortifications les murs de la paix. Les jeunes catholiques ont répliqué par les mêmes procédés. Du seul côté de la police, on compte déjà une cinquantaine de blessés.

Le Premier ministre britannique condamne bien sûr ces émeutes, qui sont pourtant le pur et prévisible résultat de sa politique inconséquente, la rançon d’un mépris ‘’colonial’’ à l’égard de tous les Irlandais. Le gouvernement de Belfast, composé d’Unionistes et de Républicains, est totalement dépassé. Après d’âpres négociations, Londres et Bruxelles étaient parvenus à une solution ad hoc, le ‘’protocole nord-irlandais’’, écartant tout retour à une frontière physique sur l’île. Ceci passait par une localisation des contrôles dans les ports nord-irlandais. ‘’L’accès sans entrave’’ promis par Boris Johnson a été un leurre. On sait maintenant que le Brexit aura bien les conséquences destructrices que l’on redoutait. Souhaitons à l’île d’Irlande de retrouver un jour le cheminement pacifique que Londres a stupidement compromis. Ce n‘est pas pour demain. Sans mentionner les états d’âme compréhensibles de l’Ecosse.

* 31 octobre – Wait and see if we sink !

Brèves des jours précédents

Le Royaume Uni fait silence. Toutes sortes de tuiles lui tombent sur la tête mais aucun message n’en émane pour caractériser la crise, à fortiori pour s’en extraire. L’échéance du 15 octobre, fixée par B. Johnson comme butoir de la négociation du partenariat post-Brexit avec l’UE, est passée sans commentaire aucun. A elle seule, elle constituait pourtant la totalité du programme du nouveau premier ministre britannique. Plus pragmatiques, ses interlocuteurs à Bruxelles ont fixé le couperet en fonction des délais de ratification d’un futur traité par les Etats-membres. Il semble que ceci permettrait d’étirer l’échéancier sur une semaine supplémentaire ou deux, en novembre. Londres ne pipe pas, ne voulant pas assumer elle-même la fin de partie  (il conviendra d’en accuser la partie européenne, le moment venu).

Mais elle souhaite surtout  garder deux fers au feu. Si D. Trump est réélu, les Conservateurs rêvent qu’il leur lancera alors une bouée de sauvetage, leur ouvrant tout grand la voie d’un libre-échange renforcé et privilégié avec les Etats-Unis. Un pari teinté d’illusions, à en croire les conditions très impopulaires imposées par Washington en matières d’échanges agro-alimentaires et de services médicaux. Si c’est J Biden qui remporte le scrutin, il se montrera assez sévère à leur égard. Peut-être faudra-t-il alors, pour le gouvernement britannique, se ménager un accord substantiel avec les 27, en accordant donc une importance particulière à la question de la frontière intra-irlandaise. Bref, l’heure n‘est pas à dévoiler des intentions mais à gagner du temps pour décrypter celles des autres joueurs.

In peto, Johnson privilégiera toujours la bonne vieille ‘’relation spéciale avec Washington’’. Sa détestation de l’UE et son soutien indéfectible à l’Alliance atlantique en attestent. L’an dernier, D. Trump s’était ouvertement réjoui de l’arrivée au n° 10 d’un dirigeant anglais populiste, avec lequel il entretient des atomes crochus (ce qui n’était pas le cas avec Theresa May). Grand partisan du Brexit, il a un peu rapidement promis, dès la sortie de l’UE, la conclusion de l’accord commercial bilatéral dont la concrétisation ne paraît plus du tout évidente. J. Biden, lui, se montre foncièrement hostile au divorce britannique de l’UE. Lorsque Westminster a adopté la loi permettant de renier les engagements internationaux du Royaume concernant l’Irlande, le candidat démocrate a prévenu Johnson que le partenariat avec les Etats Unis s’en trouvait affecté. On redoute, outre-Manche, que lui-même et Kamala Harris – née en Martinique – soient plus proches de Paris que de Londres. Frightening !

*16 octobre – Boris breaks it

Brèves des jours précédents

Le 15 octobre est passé, comme la marque d’un déni. C’était l’échéance ultime fixée par Boris Johnson pour conclure avec l’UE un accord post-Brexit à dominante économique et commerciale, mais pas que. Une façon aussi de narguer les 27 dont l’objectif reste de conclure à temps, pour que le nouveau partenariat puisse être adopté par les parlements et rentrer en vigueur avant la fin de l’année. Comme la phase de  ratification nécessite deux mois, le décalage des deux calendriers est en fait minime : deux semaines environ, mais l’état d’esprit est très différent.

C’est sur un constat d’impasse que le Conseil européen se réunit ce week-end. L’échec se rapproche et Londres paraît l’anticiper avec une sorte de jubilation masochiste. Le Royaume Uni est plus que jamais vent debout contre l’adoption d’un code de concurrence loyale et d’arbitrage des différends organisant son maintien dans la libre circulation des biens au sein du marché unique. Londres tente, sans plus, de sauver l’activité internationale de la City, sans faire de concession substantielle sur l’accès à sa zone de pêche, au nom d’intérêts électoraux minuscules. Par fierté nationale et inclination vers un modèle ultra-libéral ‘’à la singapourienne’’, il n’est plus question d’accepter quel mécanisme de régulation bruxellois que ce soit. Le grand large, encore le grand large ! Mais on chercherait en vain ces partenaires lointains, à même de compenser les déficits qu’enregistreront ses comptes avec le continent européen voisin. Attendre, en particulier, que le salut vienne des Etats-Unis, dans la situation pitoyable où se trouve la première puissance mondiale, tient de la pure folie. De plus, l’économie britannique apparaît bien malade du Covid pour pouvoir encore naviguer en solitaire.

Dans ces circonstances, le grand large verra probablement se lever la tempête. Le tempérament à frasques de Boris Johnson, de plus en plus impopulaire dans son pays, n’explique pas tout. Westminster a adopté  une loi sur la frontière commerciale en Irlande du Nord qui attente à l’accord de paix de 1998 et viole l’accord politique général conclu avec l’Europe en 2019. La crédit accordé à la parole de Londres en prend un coup. Les Gallois et les Ecossais ont, de même, compris, à l’occasion des mesures géographiquement déséquilibrées adoptées contre la circulation du Covid, que le gouvernement britannique ‘’roulait’’ pour sa base électorale anglaise (la partie populiste de celle-ci) et n’hésitait pas à piétiner leurs intérêts. Le Royaume reste un, mais assez désuni. Surtout, l’esprit de 2016, quand des millions de sujets de la Reine défilaient dans les rues en exigeant un second referendum sur le Brexit, s’est complètement évaporé. La capacité de résilience de l’opposition s’est usée avec le temps et avec des élections générales qui lui ont été très défavorables. Le sentiment – réaliste – qu’un ‘’hard Brexit’’ ne sera pas évité s’est propagé dans les esprits. Seul prévaut un brouillard de fatalisme et de désillusion, face à l’inexorable. Une vraie stratégie pour une défaite.