* 25 juin 2021 – Triste colonie russe

La Centrafrique est, on le sait, l’archétype de l’Etat failli dont la population a sombré dans une guerre civile sans fin. Les 15.000 casques bleus de la Minusca expriment le souci qu’en ont les Nations Unies, sans qu’une solution ne soit en vue, sur le terrain. La force française, envoyée sur place au début des affrontements, n’a pas mieux fait, mais elle a eu l’honnêteté de se désengager du guêpier. Ceux qui se réclament du pouvoir légitime à Bangui n’ont pas trouvé mieux que de sous-traiter à d’autres étrangers.


Pour l’ONU, les groupes rebelles, toujours très actifs, de la CPC » (Coalition des Patriotes pour le Changement) ne sont plus la principale menace sur la paix civile, la protection des populations et le bon déroulement de sa mission de maintien de la paix. Ce sont plutôt les « violations des droits de l’Homme et manquements au droit international humanitaire imputables aux forces armées centrafricaines, forces bilatérales et autres personnels de sécurité ». Derrière l’allusion à ces ‘’forces bilatérales et autres personnels de sécurité’’, chacun reconnaîtra l’armée russe et les mercenaires du groupe Wagner qu’elle amène dans ses fourgons, aux fins d’interventions extérieures ‘’discrètes’’. Loin d’être l’acteur d’une solution, Moscou n’est jusqu’à présent parvenu qu’à accroître l’instabilité du pays. Non reconnues par leur initiateur, qui prétend les assimiler à de simples prestations de conseil, ces opérations russes aux côtés des forces centrafricaines, vues de tous, provoquent des violations en séries des droits humains de la population et attisent les conflits. Les forces onusiennes, de leur côté, subissent de la part des Russes des obstructions à leur circulation, des vexations et même des pillages à l’occasion.

L’ambassadeur français à l’ONU, Nicolas de Rivière, ne mâche pas ses mots : ‘’Soyons clairs, les rapports de l’ONU pointent la responsabilité d’un acteur nouveau, qui intervient aux côtés des forces armées centrafricaines et dont le statut est un mystère. Certains s’efforceront de nier la présence de la société Wagner. Dès lors, qui sont ces hommes impliqués dans les combats, à quel titre sont-ils présents en Centrafrique et à qui répondent-ils de leur action ? » Pas à Paris ni à Pékin (qui aurait submergé le pays de projets économiques), cela va de soi ! Selon Mankeur Ndiaye, le représentant en RCA du secrétaire général de l’ONU : »l’ineffectivité de la chaîne de commandement et de contrôle et le manque d’interlocuteurs crédibles auprès de certaines forces bilatérales (…) ont fini d’installer une totale confusion’’. Moscou exige par ailleurs une levée de l’embargo sur les armes, en vigueur depuis 2013 et qui expirera le 31 juillet. A part un peu d’argent pour ses mercenaires, sans doute un accès privilégié aux richesses du sous-sol, on ne voit qu’un motif pour Moscou à se fourvoyer dans ce bourbier : la guerre hybride contre l’Occident qui obsède Vladimir Poutine.