On le sait, KIM Jong-Un déteste être oublié ou passer inaperçu. Il exècre aussi avoir à ses frontières l’armée américaine, forte de toutes ses ogives nucléaires. Il enrage, enfin, devoir voisiner avec cette maudite Corée du Sud pro-occidentale qui devrait lui appartenir et donc à ses yeux fantoche. Sa dynastie entend ferme remettre la main dessus dès qu’elle ne sera plus sous protection US. Pour faire déguerpir les Américains, son dada consiste à muscler sa République Démocratique Populaire (RDPC) en un bunker nucléaire imprenable et même intouchable. Il se doit donc de prouver qu’il peut frapper fort et loin : moins sur Tokyo, en l’occurrence, que sur Guam, Hawaï ou la Californie… Il est maître de LA BOMBE , ne s’en cache surtout pas et procède à des tirs d’essai au vu de tous. Il l’a fait à six reprises déjà avec force publicité auprès des masses enthousiastes. La 7ème serait – dit on – pour bientôt, mais la miniaturisation des charges fissiles pourrait parallèlement avancer par voie de simulation.
Côté balistique, c’est un déluge de missiles de moyenne et longue portées. Il en a lancé plus de 170 en deux ans, dont deux Hwasong-12 de portée de 4 600 kilomètres. Ceux-cci ont aimablement effectué leur trajectoire balistique au-dessus du Japon, en 2017 puis tout récemment. A chaque tir, 979 km d’apogée et 20.000 km/h à l’impact, des sirènes précipitant la population du nord de Honshu aux abris :que stratégique on comprend l’émotion des Japonais. En fait, le survol de l’archipel nippon offre une trajectoire plus pratique encore que stratégique pour faire retomber les engins dans les eaux du Pacifique et éviter une erreur et une contre-frappe. D’évidence, la fréquence frénétique de tirs – actuellement, un tous les deux jours – mériterait une mention dans le Guinness Book of Records. Mais l’ennemi que Pyongyang adore le plus haïr, répétons le, ce sont les Etats Unis.
On comprend que, face à ce mode »viril » négociation, l’Amérique se fasse du souci. Le bonhomme de Pyongyang n’est pas fou. Il suit, de façon implacable, la feuille de route dictée par son grand-père, fondateur du Régime, et par son père, ceci en parfait dictateur, froidement, sans aucun état d’âme. L’objectif suprême est logiquement de sanctuariser son régime, d’où la récente loi rendant ‘’irréversible’’ le statut de puissance nucléaire du Pays. Washington commence à sérieusement douter de ne jamais négocier avec KIM la dénucléarisation de la péninsule coréenne : un retrait de ses armes nucléaires contre le gel du programme nord-coréen.
Ce programme est aussi une bombe pour le monde. Il invite les puissances régionales à se défaire du Traité de 1970 sur la non-prolifération (TNP). Ce Traité est considéré comme le principal pilier de la stabilité du monde, du moins relativement à la menace de guerres nucléaires. Il interdit la constitution d’arsenaux cachés (on pense entre autres, à l’Iran, à Israël …) et appelle les puissances »possessionnées » à ouvrir des négociations de contrôle et de réduction. Pyongyang en a violé toute les clauses et ruiné l’idée-même d’une discipline en la matière. Sans pronostiquer quand, on peut être sûr qu’un jour, à ce droit foulé aux pieds succèdera une guerre atomique et donc plusieurs.
Mais imiter le Royaume ermite en lançant à leur tour des missiles en Mer jaune n’était pas une réponse adéquate, de la part des forces américaines et sud-coréennes. L’avoir fait, tout en se prétendant ‘’ouverts au dialogue, à tout moment’’ est une incohérence ou tout au plus un artifice de com pour les opinions publiques intérieures. Il y a une indéniable faiblesse à tourner autour du pot en voulant gagner du temps.
Le ciel du Japon ne sera plus calme pour longtemps, mais les cieux américains non plus, potentiellement du moins. Telle est la logique de la dissuasion, celle mettant en jeu deux attaques croisées potentielles. Les missiles à courte portée – jusqu’à 800 kilomètres – objet d’une cinquantaine d’essais ces quatre dernières années – sont, eux, plus susceptibles d’emploi dans une vrai guerre planifiée. Séoul s’équipe de son côté de vecteurs et de charges conventionnelles ultralourdes (8 tonnes) et donc très puissantes, dans l’idée d’équilibrer la force destructrice de son frère ennemi nucléarisé. Ces armes créent la surprise et donnent l’avantage sur le champ de bataille. C’est juste ce à quoi vise Pyongyang vis-à-vis de la Corée du Sud.
Les négociations de dénucléarisation restent inscrites dans les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Uines, mais plus vraiment à l’agenda, faute de négociation. La dernière conférence de révision du TNP a été un flop. Malgré son souhait de le faire, l’Humanité ne sait plus trop comment assurer sa survie.