4 milliards d’€uros empochés par l’avionneur français : de quoi pavoiser ! Certes, c’est l’argent des contribuables qui va garantir l’emprunt aux banques françaises, en espérant que dans les dix ans qui viennent, l’Egypte pourra rembourser. En attendant, trente Rafale flambant neuf et quelques accessoires du genre missiles, etc.: ça en impose ! La DGA, de concert avec la firme Dassault, va camper en championne de l’emploi et en bienfaitrice du monde ouvrier. Le contrat aurait été perdu, que quelques agitateurs ‘’droitdel’hommistes’’ auraient alors été pointés du doigt comme fauteurs de plans sociaux. Ce nouveau succès à l’export des armes françaises est encourageant si l’on se place sur le plan de l’industrie de défense. La France a besoin d’exporter pour s’assurer de son autonomie stratégique. Celle-ci est essentielle et dans le contexte actuel de guerre hybride mondiale, où disposer d’une aviation militaire performante est un besoin vital.
Le ‘’hic’’ – car il y en a un – est qu’elle ne vend plus guère ses matériels à la Belgique, à l’Allemagne ou au Japon mais, au contraire, à des Etats politiquement peu fréquentables et mêlés à des conflits dans lesquels le droit de la guerre est totalement bafoué. Tout se fait dans le secret, hormis la grosse propagande. La tentation de politiser ces contrats un peu sulfureux au moyen de grandes déclarations politiques creuses sur ‘’le partenariat stratégique anti-terroriste qui nous lie corps et âme’’ conduit les démagogues de service à nous chanter ces transactions – toutes commerciales – comme autant de contributions majeures à la lutte contre Daech. C’est l’exercice mécanique auquel se livre Mme Parly, encore et toujours, à la tête du ministère des Armées. Déjà cela est assez fort de café ! Le Caire et Paris entretiennent, certes, une certaine convergence sur quelques enjeux de sécurité régionale, se méfiant par exemple de la Turquie en Méditerranée orientale. Cela ne constitue pas une alliance. Par ailleurs, l’aviation égyptienne a été engagée au Yémen…
Pour le contrat Egyptien, on a totalement oublié que la tête de l’Etat a pour raison d’être de consolider la cohésion de la Nation, de défendre l’Etat de droit et surtout de ne pas bombarder l’opinion de calembredaines idéologiques. Les Rafale ne vont pas priver de sommeil Daech ni Al Qaïda : ils n‘en verront jamais les cocardes. Là où il aurait fallu sobriété et discrétion, on a fait donner de la voix Emmanuel Macron. Sur le pire des registres,qui plus est : nous affirmer que le ‘’partenariat anti-terroriste’’ avec le maréchal Abdel Fattah al-Sissi serait ‘’dissocié’’ de toute considération sur le régime (dictatorial et anti-démocratique) de celui-ci et de sa pratique abominable des droits humains. Pourquoi proclamer une telle énormité que l’on verrait plutôt dans les bouches de Viktor Orban, Donald Trump ou Xi Jinping ? Faut-il se renier pour mieux vendre ? Comment en arriver à désigner la démocratie comme une gêne pour le marchand ? Si d’aventure l’on vendait des Rafales à la Chine, souscrirait-on à la liquidation démocratique de Hong Kong, par devoir de complaisance commerciale ?
L’insulte est autant à nous-mêmes, démocrates et français, qu’aux milliers de combattants pour la démocratie – sans même mentionner les islamistes – qui sont torturés au quotidien dans les geôles du Maréchal. Le marketing en matière de vente d’armes à des dictatures consiste-t-il à se présenter soi-même en dictateur-ami des dictateurs (larme) ?