Le sort en est jeté : plus rien ne devrait sensiblement modifier le choix des Français, sauf bien sûr une erreur des sondages. Le »grand débat » du second tour laissera beaucoup de citoyens sur leur faim. Sans oublier les observateurs du monde entier, qui se demandent une fois encore, vers quel avenir incertain ou confus le Pays de Voltaire veut les entrainer ? En particulier, s’agissant de l’avenir de la Paix ou de celui de l’Europe. N’existe-t-il pas d’alternative à ces tableaux en mode »slogans » des politique intérieure et extérieure (en fait, les mêmes) ? Ils sont si antagonistes, si peu nuancés. Dans l’ambiguïté d’un enrobage destiné à endormir l’appréhension, les positions de la candidate de l’extrême droite sont bien celles, décryptées par les précédentes brèves de ce blog. Sinistres !
Soyons caricatural : au centre-droit, une évidente compétence mais d’essence bureaucratique, sans proximité naturelle avec les gens. Néanmoins, la Démocratie et la recherche de la Paix sont là. A l’extrême droite, l’incompétence – mal dissimulée – que compense une image très travaillée de proximité avec les besogneux … et autant avec les dictateurs populistes. Perspective d’enthousiasme populaire, deuil des institutions démocratiques, dérapage possible de la préférence nationale vers la guerre civile et extérieure : c’est le grand frisson !
Le second tour sera un sondage en grandeur réelle sur ce que croient être les Français. Un peuple émotif et idéologisé, sans doute. Une nation cassée en deux peuples. D’un côté, les partisans de l’intégration au monde, avec l’apport régulateur de la diplomatie et de l’Etat de droit. De l’autre, des personnes »déclassées », en souffrance, accablés par le ressentiment et portés au repli autarcique. Le désir de justice contre »ceux d’en haut », peut même donner place à un désir de vengeance (la doctrine »gilets jaune »).
Selon la France à laquelle on s’identifiera, la perception du grand débat divergera du tout au tout. Un bloc de citoyens préfèrera retenir les postures, le niveau de langage, l’empathie. Un autre, l’analyse et la raison, y compris leur propre résignation. S’agit-il alors vraiment d’un débat national ? Non. ce n’est qu’une scénographie élaborée par les protagonistes eux-mêmes, dont les séquences se sont succédé de façon décousue (le pouvoir d’achat, puis la question de la Paix et de la guerre !). Il n’ y aura pas eu de fil conducteur, ni de mise en perspective suffisante des questions imbriquées ou interdépendantes. Les candidats l’ont voulu ainsi, les journalistes acceptant de n’être que les chronométreurs de leur débit oral.
Le public n’aura pas eu accès à des visions politiques de long terme. L’adaptation des institutions de la République aux nouvelles exigences démocratiques de la société n’a été traitée que par un bord et à coups de sabre. Les voies de la Paix (mais quelle paix ?), la crise climatique, l’avenir de l’Europe, la gouvernance dans le monde émergent n’auront pas été abordées en tant que questions liées. On a même assisté à une piteuse convergence autour de l’envie de se débarrasser des migrations, lesquelles traduisent l’état de notre monde, ce monde que nos parents ont en grande partie forgé mais qu’on ne reconnaît plus (est-ce là une remarque »identitaire ?).
Bref, les électeurs (et les abstentionnistes) français vont tenter, dimanche, de changer le monde, à la mesure de leurs émotions, sans être aidés dans leur effort d’appréhension du réel. Ce serait finalement plus clair de parler uniquement des valeurs qui sont celles du Pays, de son histoire, de ses penseurs, de sa sociologie. Les scénarii préétablis dans les programmes électoraux sont toujours battus en brèche par la course folle du monde. Puisqu’on en arrivera nécessairement à improviser, face à l’imprévu, il faudrait, en tant que citoyen, privilégier la voix de sa conscience et l’auto-développement de son discernement.
Bon vote (ou bonne pêche) à tous !