Ca recommence ! Le gouvernement de Boris Johnson menace de récuser des pans entiers du protocole du traité de Brexit de décembre 2019 instaurant une frontière douanière entre l’Irlande du Nord et le reste du Royaume-Uni. ‘’Nous n’avons pas encore pris de décision finale mais la situation est très sérieuse’’ : non il ne s’agit pas de l’Ukraine mais bien du ‘’front’’ britannique. Les répliques du divorce acrimonieux se répètent à l’infini entre Londres et Bruxelles. Et ça lasse fermement le public.
Défié par la cuisante défaite des Unionistes nord-irlandais en Ulster, Londres redouble d’assauts contre ce dispositif conçu pour éviter de relancer la confrontation entre communautés catholique (en progrès) et protestante (qui a perdu la majorité parlementaire). Johnson menace d’abandonner le chapitre irlandais du Traité – unilatéralement – en violation des engagements internationaux du Royaume. Le Royaume-Uni se verra »contraint d’agir si l’Union européenne continue à se montrer inflexible’’. Ce sera par le biais d’un projet de loi que la Chambre des communes examinera dès la semaine prochaine. Il révoquera purement et simplement les contrôles douaniers établis en mer d’Irlande et cela rétablira ipso facto un marché unifié pour les produits transitant entre l’Angleterre et l’Irlande du Nord. Ce qui revient à séparer à nouveau les deux parties irlandaises. Est-il vraiment correct d’instrumentaliser Bruxelles ainsi, avec autant de mauvaise foi et de mettre de plus de l’huile sur le feu irlandais ?
A Bruxelles, on maintient qu’’’on ne renégociera pas le protocole’’ mais quel en serait le besoin si celui-ci se voit torpillé sans semonce ? Boris Johnson est un pirate, on le sait, et on ne peut y faire grand-chose, sauf à manigancer une seconde guerre en Europe. Mais l’ère napoléonienne est passée de mode. On n’y peut d’autan rien que l’Union a déjà fait toutes les concessions possibles. A l’automne 2021, les contrôles sanitaires et phytosanitaires pour les produits alimentaires, végétaux et animaux destinés à l’Irlande du ont été réduits de 80% et les formalités douanières, allégées de moitié. Les règles concernant l’approvisionnement de l’Irlande du Nord en médicaments britanniques ont également été assouplies. L’Ulster, dans la vision de la ‘’Grande Bretagne globale’’ (la résistance sacrée à l’UE) est destiné à devenir un grand entrepôt où toutes les exportations anglaises passeront sans contrôle aucun dans le marché unique européen. J’aime beaucoup les biscuits Mc Witties et j’escompte bien qu’ils arriveront jusqu’à moi par la bande, hors-taxe !
Seulement, un grain de sable pourrait se glisser dans ce ‘’great design’’. Le jour où le Sinn Fein, majoritaire, prendra la tête de l’Exécutif nord-irlandais, la réunification des deux Irlande ne sera plus loin. Le nouvel Etat réunifié resterait amarré à l’Europe et sa frontière tomberait exactement là où Londres la refuse farouchement. Damnée Europe, vous dis-je !